Que serait l'éducation sans Jean-Jacques Rousseau ? Cet ouvrage absolument génial pose les bases de ce qui deviendra l'éducation moderne.
A travers le personnage d'Emile, Rousseau nous présente une éducation plus humanisée. Au vu de l'ensemble de l'œuvre de notre auteur, ce livre constitue un point clé de la pensée rousseauiste. Partant de l'idée que l'homme nait bon mais corrompu par la société, en opposition au dogme du péché originel défendu auparavant par Saint Augustin (dont Rousseau reprendra le titre de son livre : les Confessions), la pensée rousseauiste nous appelle à changer cette société de façon politique d'abord via le Contrat social (qui aura une importance certaine pendant la Révolution française) puis grâce à l'éducation, d'où l'intérêt de cet ouvrage.
Le raisonnement de Rousseau est très clair et limpide, si bien qu'on se sent facilement happé par sa puissance argumentative. Il est dur de lire Rousseau en gardant un point de vue objectif, mais il le faut pour encore mieux saisir la force de cette œuvre. L'Emile a eu un effet certain sur la société de son époque (il fut publié en 1762) : les mères placèrent subitement moins d'enfants en nourrice. L'Emile a donné une importance aux enfants, jusqu'alors perçus comme des ignorants inintéressants, et a permis un gain d'intérêt sur le développement de ces petits êtres. L'Emile est cependant toujours d'actualité, toujours plein de vérité, à l'heure où l'éducation nous préoccupe davantage. Rappelons qu'au Japon, la lecture de l'Emile est obligatoire pour toute personne se destinant au métier d'instituteur.
L'Emile est un bon ouvrage pour se trouver des valeurs utiles à sa propre vision de ce que doit être l'éducation. Il trace un idéal humaniste. L'Emile pose des questions justes, en même temps qu'il nous apporte des éléments de réponse remarquables. L'œuvre se divise en livres constituants des étapes importantes de la vie de l'enfant pendant lesquelles tel trait de caractère sera plus accentué qu'un autre, pendant lesquelles des questions différentes se poseront. C'est aussi un gros travail d'observation.
Un des reproches les plus courants se fonde sur une comparaison entre la vie privée de notre auteur et sa théorie. Il est vrai que Rousseau a abandonné ses enfants, et d'un point de vue moral, les plus sensibles dénonceront cette œuvre géniale comme un ramassis de paroles en l'air. Utiliser la vie de l'auteur pour parler de l'œuvre, cela peut être tout à fait intéressant par moments, mais nous avons de nos jours fort heureusement dépassé le regard critique à la Sainte Beuve. Focalisons-nous sur ce que Rousseau nous dit en tant que théoricien, en omettant volontairement l'anecdotique. N'est-ce pas éminemment sensé ? N'est-ce pas véritable ? Qu'importe le reste ! Qu'importent les moralisateurs !
A lire, je le recommande à tout le monde, enseignants et parents en priorité (c'est même vital à mon sens) !