Le K. Dick's Cube, ou le casse tête temporel en 42 dimensions.

"En attendant l'année dernière" de K. Dick


Publié quelques années avant les purs chefs d’œuvre que constituent "Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques" et l'incroyable "Ubik", "En attendant l'année dernière" est une œuvre qu'on peut considérer comme "classique" dans la bibliographie de K. Dick.


En effet, on retrouve dans ce livre moyen les marottes et toiles de fond habituelles de Philip K Dick, à savoir : le voyage temporel, la dépression, les drogues (et les drogué.e.s), l'ONU comme sorte de super état de la planète, l'utilisation outrancière du mot "conapt" et une vision de la (sa) femme disons... particulière.


Eric Sweetscent, chirurgien fauché victimisé par son épouse Kathy, se retrouve impliqué dans une machinerie infernale où Molinari, sorte de dictateur du monde décrépit hypocondriaque en fin de vie permanente, tente de déjouer les pièges d'une guerre qui voit la planète Terre confrontée à des insectes dont personne ne comprend rien, et alliée à une superpuissance qui utilise Molinari et les terriens comme des esclaves afin de mettre un terme au conflit qui oppose cette superpuissance auxdits insectoïdes depuis des siècles. Ouf.


Ce que je trouve en général d'intéressant chez K Dick, c'est que même si c'est un écrivain d'idée, de "concepts" un peu tirés par les cheveux, en bref, quelqu'un qui fait dans le spectaculaire, il se noue en général un drame intérieur chez le personnage principal, souvent alias de Dick lui-même. On se rappellera, pour celles et ceux qui l'ont lu, les affres du personnages des Androïdes rêvent-ils de moutons électriquse, perdu dans le désert, qui fond quasi en larme en se rendant compte que son animal n'est autre que... Enfin bref, lisez-le, c'est formidable.


Ici, on retrouve cette sorte de mélancolie du héros, les souffrances intérieures causées par le dégoût de soi-même, du regard des autres, et surtout de sa femme qui semble prendre un malin plaisir à faire de notre docteur un étron en soins palliatifs. Enfin bref, la formule du protagoniste dickien dans toute sa non-splendeur, sorte de loser qui retrouve sur ses épaules le poids du monde alors qu'il peine à porter celui de son regard devant le miroir.


Mais le côté foutraque du livre, délayé, sa propension à faire durer inutilement une intrigue pas folichonne, à faire sur-coudre des retournements de situation sur retournements de situation tend à rendre le suivi de l'histoire pénible, voire incompréhensible.


De plus, comme très souvent chez l'auteur, la femme du héros est une vraie conasse, à tel point qu'on se demande à chaque page où elle apparaît ses motivations, si ce n'est celle d'être, eh bien, une vraie conasse. C'est un peu léger, et mon petit doigt, qui s'avère être le plus grand à cause d'une malformation physique, me fait dire que les turpitudes de la vie sentimentale de K. Dick n'y sont pas pour rien.


Restes de jolies pages, dans les rues de Tijuana, où Sweetscent hère le regard hagard à la recherche d'une petite lueur dans son existence. Ces pages sont symboliques de ce que K Dick, selon mes goûts, fait de mieux : dériver de son intrigue et de ses effets de manches, afin de confronter son héros à ses propres erreurs, à sa propre horreur de lui même, de la futilité d'être "là" lorsqu'on n'a pas encore trouvé une raison, n'importe laquelle, de l'être, là. A ne pas entamer une fuite en avant continuelle, ou mortelle, poussé par les engrenages d'une machinerie qui le dépasse et le broie, l'incorpore, comme le héros de Chaplin. Si ce n'est qu'ici, la machinerie, c'est le cerveau.

batche
6
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le 24 mai 2019

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batche

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