Je sais bien que ce n'est pas une chose à faire mais à la lecture de Et toujours les forêts, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Ravage pendant une bonne partie du roman, en tout cas ce dont je me souviens du roman de René Barjavel : une histoire de fuite et de survie dans un monde anéanti par la main de l'homme, avec sur les épaules des miraculés le poids accablant du souvenir d'un paradis perdu.
L'écriture de Sandrine Collette n'est pas moins lyrique et évocatrice mais dans un style plus rugueux. Les phrases sont courtes, sèches et hachées et le lecteur doit parfois décoder pour saisir pleinement le récit. La nature nourricière et plantureuse a disparu, le monde est à genou, sans lumière, sans couleurs, ni bruits. L'auteure a le talent de nous le faire ressentir. C'est sombre, c'est désespéré, c'est angoissant mais les phrases sont belles. Le roman est magistral.
Evidemment, ce qui participe au malaise et à la fascination morbide que le récit suscite, c'est l'aspect prémonitoire, la probabilité non négligeable que ça puisse nous arriver. On y pense forcément en accompagnant Corentin, l'instinct de survie chevillé au corps et l'espoir au coeur. Malgré tout.