Bon ça va, j'vous vois venir. Pour quelqu'un qui se bâfre de lectures torturées, de romans noirs, de littérature fantastique aux tempos endiablés, à l'action débordante et à la déconstruction des codes narratifs usuels, Étés anglais DÉTONNE complet dans ma sélection de livres lus dernièrement.
Mais (mais) j'ai dans mon entourage des confrèresoeurs assez doué.es pour insuffler cette petite folie, ce petit risque à prendre en s'aventurant dans des territoires inexplorés, et c'est ainsi que ce roman m'a intrigué au point de m'entendre dire "allez banco, je m'y colle".
Bon. J'ai mis deux semaines à le lire, ce qui pour un roman d'à peine 500 pages n'est pas une bonne moyenne (pour moi), autrement dit ; j'ai accroché, je me suis fait chier, j'ai décroché, j'ai repris, je l'ai dévoré. Les montagnes russes quoi.
Laissons de côté les aspects négatifs le temps d'un pavé décousu et attardons nous sur ce qui m'a plu dans ce premier tome de la trilogie de la famille Cazalet ; c'est un roman qui se déroule avant la Seconde Guerre Mondiale (deux ans, deux étés qui se suivent pour être plus précis), dans lequel l'auteure décrit minutieusement la vie quotidienne d'une dynastie anglaise bourgeoise flirtant avec l'aristocratie moderne. Les dernières familles victoriennes dont j'avais lu les aventures venaient des Hauts de Hurlevent. Et même si citer Brontë est un peu facile quand on plonge dans la littérature anglo-saxonne, l'analogie est plus qu'évidente ; bien que ce roman s'attarde sur chaque membre de la famille, ainsi que de leurs bonnes, ouvriers, ...etc. la place accordée aux femmes est plus qu'intéressante. Le poids des conventions et du paraître, du peu d'intérêt qu'on prête à la gente féminine, au déni de leur corps, (viol/inceste/accouchement/avortement) tout y passe.
Bon ok, ce roman a été écrit au début des années 90 et c'est facile de prendre du recul avec un regard encore plus féministe aujourd'hui, mais voilà, cette saga s'inscrit dans la lignée de Mrs. Dalloway de Virginia Woolfe ; la souffrance et la mise au ban des compétences intellectuelles, des prétentions artistiques des femmes dans une société bourgeoise patriarcale (et anglaise de surcroît).
Tout ceci insuffle un rythme, un parti pris qui n'a pas fini de me charmer et c'est avec une envie un peu perverse de voir quels allaient être les travers de tel personnage que je me suis délecté.
Les aspects négatifs (si vous êtes encore là), tiennent surtout des descriptions, beaucoup trop longues. Ce sont littéralement des scènes de tableaux entiers que nous dépeint l'auteure. À en alourdir les paupières les plus téméraires en cas d'insomnie, juré. Ajoutez également une (très) grosse pincée de romance légère et frivole, d'émois adolescents, d'adultères et de secrets de familles enfouis.
(bon sur ce dernier point ; je déteste parce que c'est un exercice hyper facile, qui agit forcément sur le cerveau et son envie malsaine de satisfaire une curiosité de petit voyeur à deux balles, exactement comme quand on se délecte d'un épisode de télé réalité)
Rien de bien grave donc (et vive le divertissement).
Tout ceci m'a donné une folle envie de plonger dans le 2e tome, surtout vu comment celui-ci se termine (bien vu le coup d'accrocher le lecteur avec quelques pages du livre qui suit, bien vu).
Go for it !