Étude pour une déclaration des obligations envers l'être humain par Ascyltus

Alors que la Seconde Guerre mondiale fait rage, que les totalitarismes s’affirment et que les démocraties ont montré leurs limites, Simone Weil s’interroge sur les conditions d’une action juste. Refusant d’établir des « droits » attachés à la personne humaine, car selon elle la notion de droit est trop liée au marchandage et à la négociation, elle définit plutôt ses « besoins », matériels et spirituels, qui constituent autant d’« obligations » pour qui veut agir de façon juste. Surtout, elle fonde sa vision de la justice sur le respect de la dimension sacrée de chaque individu, dans une perspective très inspirée par la pensée chrétienne.


Autant j’ai trouvé Simone Weil très efficace pour réfuter certaines thèses, comme quand elle montre en une page les limites du personnalisme de Mounier (trop vague) ou des solutions collectivistes (le collectif n’étant lui-même qu’une abstraction), autant j’ai trouvé, quand il s’agit d’exposer ses propres idées, que l’argumentation est assez filandreuse et répétitive et peu organisée, avec des arguments souvent plus assénés que démontrés. L’inspiration religieuse évidente fait, je pense, qu’il est également plus difficile d’être convaincu si l’on ne partage pas la foi de la philosophe.

Se pose également le problème de la mise en pratique de ces idées, ce dont Simone Weil elle-même semble consciente. Il est bien beau d’affirmer que ceux qui exercent le pouvoir doivent être habités par la « folie d’amour », comment cela se met-il en place concrètement ? Simone Weil affiche sa méfiance envers les constructions juridiques. Mais à la même période, la réflexion juridique, avec l’élaboration de la notion de crime contre l’humanité, et bientôt la Déclaration universelle des droits de l’homme, montrait que le droit peut améliorer la condition humaine. Mais j’ignore si les travaux de Simone Weil n’ont pas influencé ces avancées. Enfin, en fondant l’éthique sur le respect de ce qu’il y a de sacré en chaque individu, et donc en donnant à sa pensée une forte dimension religieuse, il m’a semblé que Simone Weil, assez souvent, n’arrivait pas à des conclusions si différentes que celles auxquelles mène l’impératif catégorique kantien.


J’ai donc trouvé bien des limites à la réflexion de Simone Weil. Il n’en reste pas moins qu’elle est admirable par sa hauteur morale, et qu’elle m’a intéressé par les questions qu’elle pose sur ce que doit être un vrai humanisme.


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le 2 août 2024

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