Les images populaires du christianisme
Luc n'a pas connu directement Jésus. Ce médecin avait été employé comme secrétaire par Saint Paul en raison de sa connaissance du droit. De ce fait, cet évangile date d'une bonne trentaine d'années après la mort de Jésus. L'évangile de Marc reste sa source essentielle (il en respecte largement jusqu'au plan), tout en l'abrégeant parfois. Il y a ajouté les « évangiles de l'enfance », dont le récit est effectué à partir du point de vue de Marie, par le truchement du témoignage de Jean l'Evangéliste.
L'autre originalité de Luc est le récit des apparitions de Jésus après sa résurrection, que Jean l'Evangéliste a pu lui transmettre directement.
Dans la généalogie, Luc cherche à démontrer que Jésus est à la fois le descendant bien charnel des roi d'Israël (par sa mère), mais également le « Fils de Dieu », en quelque sorte charnel, puisqu'il fait remonter sa lignée à Adam.
Renseigné par des sources dont nous ignorons l'identité (à part le probable original araméen de Matthieu), Luc est le seul à avoir introduit des épisodes comme la résurrection du fils de la veuve de Naïm, le pharisien et le publicain, Lazare et le mauvais riche, l'intendant infidèle, l'histoire de Zachée, la comparution de Jésus devant Hérode. Cela confère une troisième dimension à la question de l'élaboration des traditions sur Jésus, dans la mesure où l'évangile de Luc nous fait pressentir que beaucoup d'informations nous sont probablement perdues, car personne n'a pris le soin d'aller enquêter.
Moralement, Luc insiste sur la vertu de miséricorde du Christ, la nécessité de se détacher des richesses, et de prier.
Luc a un talent de romancier, ce qui peut le placer à l'origine des littérateurs chrétiens auteurs de narrations apocryphes. Il sait amener une situation et, au besoin, la créer puis, tout à coup, feindre de l'oublier pour obtenir, sans qu'il y paraisse, une énormité (en XI, 37-52, Jésus injurie son hôte pharisien à dîner). Il sait doser la progression de l'action dramatique, ainsi que la progression de l'intensité émotionnelle, camper un caractère, appeler de loin un évènement.
Luc captive par sa bonhomie de ton, son allégresse, son goût du merveilleux, de la modération et de la sagesse.
Passages remarquables : le Magnificat (chapitre I), la Nativité (chapitre II – pas de bœuf ni d'âne !), la filiation directe Jésus-Adam-Dieu en III, 38, la paille et la poutre (VI, 42), la pécheresse baignant les pieds de Jésus avec ses larmes et les lui essuyant avec ses cheveux (chapitre VII), le bon Samaritain (chapitre X), l'enfant prodigue (chapitre XV), Lazare et le mauvais riche (chapitre XVI – qui fonde l'éternité des récompenses et des supplices dans l'au-delà), Zachée sur le sycomore (chapitre XIX), le denier de César (chapitre XX), le Jour de Colère (chapitre XXI), la dernière Cène (chapitre XXII), les apparitions de Jésus après sa résurrection (chapitre XXIV).