La fondation du christianisme
A l'origine du christianisme, le personnage de Jésus nous est connu essentiellement par quatre textes différents, de cinquante à cent pages chacun, tenus pour valides par les Eglises chrétiennes (on les qualifie de « canoniques »). Ces textes sont intitulés « Evangiles » (en grec eu-angélion : « bonne nouvelle »), car ils contiennent à la fois l'enseignement religieux de Jésus (considéré comme pouvant mener au salut éternel si on en respecte les termes), et le récit de l'évènement central qui fonde le christianisme : la résurrection de Jésus (« ...et si le Christ n'a pas été relevé, votre foi est vaine, et vous êtes encore dans vos péchés... » - Première Epître aux Corinthiens, XV, 17). La résurrection de Jésus est double bénéfice pour les chrétiens : elle rachète tous les péchés du monde par la souffrance du crucifié, et elle est promesse d'une vie éternelle « à la fin des temps » pour ceux qui seront sauvés.
Matthieu, ancien percepteur, est le seul des Apôtres de Jésus qui eût pris des notes par écrit. Comme Jésus parlait l'araméen, ces notes (aujourd'hui disparues) étaient en araméen, et Matthieu, vers l'an 45, les traduisit en grec (langue de diffusion culturelle de toute la Méditerranée Orientale), en les insérant dans un récit de la vie de Jésus. On considère que la rédaction finale du texte peut être située entre 60 et 85. Il semble que l'Evangile de Marc soit antérieur à celui de Matthieu, et que ce dernier en ait abondamment utilisé la matière, sans respecter l'ordre des narrations.
L'Evangile de Matthieu reflète le point de vue des « judéo-chrétiens » antiques : Jésus n'a rien supprimé de la Loi juive, et lui a seulement donné son sens véritable. En montrant que Jésus est « Fils de Dieu », il insère Jésus dans la tradition juive, en cherchant à faire reconnaître en lui le « Messie » attendu par les Juifs, qui viendra juger et sauver les Elus à la fin des temps. La généalogie de Jésus cherche à établir la filiation du Christ par rapport à la lignée royale d'Israël.
Le langage simple et direct du texte donne l'occasion de retrouver nombre de passages maintes fois exploités par la théologie, les arts plastiques et la musique : le baptême de Jésus par Jean-Baptiste, Jésus tenté au désert par le Diable, Jésus recrutant des pêcheurs de la « mer de Galilée ». Liste des Apôtres au chapitre X. Attitude négative des Pharisiens, partisans d'une piété formaliste et ostentatoire. Parabole du Semeur (chapitre XIII). Multiplication des pains et marche sur l'eau (chapitre XIV). Désignation de Pierre comme chef de l'Eglise (ecclésia = « assemblée »), chapitre XVI. Transfiguration de Jésus (chapitre XVII). Parabole des Enfants (chapitre XVIII). Règles de conduite du chrétien (chapitre XIX). Les ouvriers de la onzième heure (chapitre XX). Entrée à Jérusalem et scandale des marchands du Temple (chapitre XXI). Le denier dû à César (chapitre XXII). Annonce du Jour de Colère (chapitre XXIV). Parabole des Vierges Sages et des Vierges Folles, parabole des Talents (chapitre XXV). Passion de Jésus, reniement de Pierre, trahison de Judas, procès de Jésus, Passion et résurrection à partir du chapitre XXVI.
L'annonce sublime des « Béatitudes » est un des plus beaux passages du Nouveau Testament. Le message de Jésus contient, entre autres, la nécessité de redresser les cœurs et le désir, au lieu de s'en tenir hypocritement à un accomplissement formellement irréprochable des rites, mais qui laisse subsister la haine, le calcul, le Mal dans l'Homme. Il faut donc aimer aussi ses ennemis. Le texte de la prière la plus connue du christianisme, le « Notre Père », se trouve au chapitre VI.
La confiance christique en Dieu, avec son esprit d'abandon un peu naïf en la Providence, qui s'est retrouvée chez les hippies, est évoquée dans le même chapitre.
Plusieurs miracles de Jésus sont racontés : guérison d'un lépreux, d'un paralytique, du fils du centurion, démons chassés du corps de possédés (belle référence pour les récits d'exorcismes).
Un des textes fondateurs du christianisme et de la civilisation occidentale.