D'Ésope, il ne nous est rapporté que très peu de choses sur sa vie (esclave à Samos ? condamnation à mort après une fausse accusation ? mort violente ?), il est en cela à rapprocher du fameux aède Homère, dont la réalité historique laissa songeur plus d'un helléniste. Les fables attribuées à Ésope ont-elles été écrites d'une seule main ? Voilà qui étonnerait plus d'un lecteur après avoir achevé les 358 fables qu'il aurait composées. Ce n'est pas que des différences de style apparaissent au fil des textes, au contraire, c'est plutôt la saisissante unité de l'œuvre qui trouble dans son expression naturelle, son élégante simplicité, une fluidité stylistique qui parait aisée à reproduire, démontrant tout le talent déployé par les auteurs anonymes pour rendre la fable unique en son genre. Nous pourrions en citer sans difficulté des dizaines d'excellentes (j'avais pensé à noter toutes celles que je trouvais intéressantes, il y en eut finalement trop pour que ça ait un sens : 1-8-12-13-16-23-26-27-34-40-…). Bien sûr, après la lecture des 200 premières, une légère redondance s'installe, l'émerveillement des premières fables nous rend moins sensibles aux suivantes, mais la qualité des formulations nous oblige à témoigner tout le respect que mérite l'œuvre. Il faudra également souligner tout le mérite du traducteur (Émile Chambry dans mon cas) pour avoir su les retranscrire si harmonieusement. Concernant la moralité des fables ésopiques, ainsi que le souligne M. Chambry, « il arrive parfois, il est vrai, que la moralité n’a qu’un rapport assez lâche avec la fable, ou même qu’elle n’en a pas du tout. » Cela n'empêche qu'il en est des très bonnes, à l'instar de l'Avare (344) où « la possession n'est rien, si la jouissance ne s'y joint. » Nous ne citerons pas toutes les fables reprises par notre fabuliste national Jean de La Fontaine (pour lequel j'avoue n'avoir pas la moindre estime ainsi que le signale ma critique à son égard) encore populaires aujourd'hui pour montrer le génie des auteurs originels.