En Afrique du sud, en plein apartheid, Rosemarie Burger est élevée dans une famille communiste et militante pour les droits civiques. Elle vit son enfance bercée par la lutte, les visites en prison et actions clandestines. Quand son père, leader reconnu, meurt en prison, elle se retrouve seule. A vingt ans, attachée à son indépendance, elle cherche sa voie. Malgré ses convictions elle se sent écrasée par l'héritage familiale.


Rosa est un personnage qui m'a profondément touchée. Partageant les convictions de ses parents, elle se refuse néanmoins le même destin qu'eux. Elle ne renonce à aucune de ces convictions mais refuse de se battre pour elle. Elle est fondamentalement indépendante et cherche à conquérir sa liberté. Très vite la nécessité de quitter lui apparait. Mais la tâche est ardue quand on est sous étroite surveillance policière. Elle fuit pour mieux se retrouver. Elle est libre aussi dans ses rencontres, dans ses rapports aux hommes.


Le récit passe régulièrement de la première à la troisième personne. On peut parfois avoir la même scène racontée par un narrateur extérieur puis par Rosa. Ce procédé est intéressant car on est presque omniscient, à la fois spectateur et au plus prés des pensées de Rosa. Néanmoins cela rend la lecture un peu compliquée par moment et le style, fait de très longues phrases, peu décontenancer. Pour ma part j'ai été extrêmement touchée par certaines descriptions de paysages. L'auteur utilise des comparaisons surprenantes mais très sensibles. Les paysages de l'Afrique du Sud nous sont donnés a voir, c'est un véritable voyage.


"La tente de soie de la mer matinale battait, fixée aux échancrures des ports où des bateaux frottaient leur nez contre les quais comme des animaux devant un abreuvoir."


La réflexion sur le poids de l'héritage est très intéressant. Ce n'est pas une vision binaire, Rosa ne rejette ni n'embrasse les convictions de ses parents. Elle cherche seulement une troisième voie, la sienne. Elle s'interroge sur ce qui l'a construit, sur l'impact que son enfance a sur ses choix d'adulte.


Les échanges qu'elle a avec d'autres personnages sont parfois le prétexte à un débat politique sur l'apartheid et plus largement sur les relations entre noirs et blancs. Les points de vue s'affrontent, parfois en la bousculant. De cette manière le lecteur peut appréhender de façon réaliste la situation du pays. En proposant aussi la vision des opprimés sur les blancs qui les soutiennent on a un discourt nuancé et inédit. Ces passages sont autant de propositions de réflexions sur le racisme et sur les liens entre peuples dominants et peuples opprimés.

Anaïs_Alexandre
9

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Créée

le 23 avr. 2017

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