Gatsby le magnifique: une mécanique narrative aussi intrigante que son personnage principal.
Ayant vu l'adaptation ciné dont j'ai fait la critique, j'ai voulu lire le roman de Fitzgerald pour me faire une idée de l'écrin original. J'ai été surpris de tomber sur un objet essentiellement narratif, mais c'est justement cet état de fait qui rend un livre adaptable au cinéma.Un surplus de dialogues et de scènes à rallonges aurait été un vrai casse-tête pour les réalisateurs qui se sont attaqués à ce classique de la littérature américaine.
Ce qui m'a frappé aussi, c'est la capacité de Fitzgerald à aller droit au but, de tailler des scènes au scalpel sans qu'elles perdent de leur cohérence et de leur saveur.Il faut dire que l'écrivain, avant d'être reconnu, a travaillé pour de nombreux journaux américains.Cette concision stylistique est donc là.
Francis Scott Fitzgerald, en choisissant Nick Carraway comme narrateur omniscient, prend le parti pris d'un personnage qui a été conquis par les valeurs de Gatsby tout comme il a été dérouté par ses excès.Un juste équilibre même si Carraway semble être happé par les évènements au même titre que Daisy Buchanan,sa cousine, et son mari Tom.Même si Carraway est sensé être plus lucide, son jugement peut alors manquer naturellement de conviction.
Je me permets donc une supposition: en plus de Carraway, Fitzgerald avait besoin d'un autre témoin.Il s'agit de la figure graphique du Dr T.J.Eckleburg. Cette publicité silencieuse, apparaissant tout au long du roman, semble justifier la véracité des évènements et comforter Carraway dans sa légitimité d'observateur. Car dit et non-dit peuvent coexister pour défendre une même vérité.A vous de juger.