Guerre et Paix
8.2
Guerre et Paix

livre de Léon Tolstoï (1867)

Si George R.R. Martin avait placé son intrigue dans la Russie du début du XIXe, ça aurait donné ça

Par où commencer ?


Bon, déjà, disons que Guerre et Paix et moi, c'est une histoire d'amour ambivalente, avec ses hauts et ses bas, son lot de passions et de déceptions, de moments d'exaltation et d'ennui tout comme de tristesse et de joie. Ces différents sentiments, loin d'enlever en rien l'intensité de l'expérience, l'ont renforcée. Après une lecture d'une durée pratiquement aussi étalée que la période couverte par Tolstoï dans l'entièreté de son roman (et c'est un euphémisme), j'en ressors plus que jamais attirée par la littérature russe que je découvrais ici pour la première fois (malgré un petit essai plus jeune auprès du Nez de Gogol, qui m'avait laissé une impression plus qu'agréable).


J'ai donc ouvert ce livre sans a priori quelconques, n'ayant aucune connaissance ni de l'auteur, ni de son travail, ni de son époque, encore moins de l'empire Russe d'avant Nicolas II et la chute des Romanov, merci Anastasia. commence à fredonner Je me souviens il me sembleeee, des jeux qu'on inventait ensembleeeee, je retrouve dans un sourireeee, la flamme de mes souveniiiiiiiiiirs !


Excusez, je m'éloigne du sujet.


Hum, je reprends.


C'est simplement par hasard (j'entends déjà Tolstoï au loin désapprouver ce propos), ou par nécessité si vous préférez, et très attirée par la belle couverture de l'édition présente chez moi (Marabout Géant, Triple volume, allez checker) que je suis tombée sur Guerre et Paix. Résumer ce colosse de près de 2000 pages me semble être une entreprise aussi délicate que d'essayer d'obliger les Français à porter leur masque. Cependant je vais m'y essayer, au risque de me prendre quelques coups de battes de baseball.


Plaçons d'abord le contexte historique où se déroule l'intrigue : 1805, la Russie impériale est alors gouvernée par Alexandre Ier, et Napoléon Bonaparte, fait empereur l'année précédente et qui débute son règne en France, est à la tête de nombreuses expéditions à travers l'Europe se solvant pour l'instant par des victoires, attribuées par tous à son génie militaire. D'Austerlitz à la prise de Moscou, l'écrivain décrit de l'intérieur et du point de vue russe (qu'il nous est intéressant d'examiner, surtout en notre qualité de Français) les grandes batailles de toute la période napoléonienne, càd jusqu'en 1813.


Maintenant que le cadre est posé, ajoutons-y les personnages. Outre les personnages historiques ayant réellement existé, comme les deux empereurs bien entendu, mais également des hommes délaissés par la postérité ici réhabilités (gros big up au poto Koutouzov), l'on assiste à la déclinaison d'une multiplicité de personnages aux caractères assez différents et nuancés, faisant tous sans exception partie intégrante de la haute société péterbourgeoise ou moscovite, et appartenant à de grandes familles aristocrates. Les citer prendrait trop d'un temps que vous n'avez sûrement pas, mais l'on distingue à peu près une dizaine de personnages principaux (Pierre Bézoukhov, Natacha Rostov, Marie et André Bolkonsky, Nicolas Rostov pour les plus importants) dont l'on suit le parcours pendant près d'une décennie. Chacun n'étant pas forcément lié, l'histoire de l'un peut-être racontée indépendamment de l'autre, et l'on passe de l'une à l'autre sans être le moins du monde perturbé, tant l'écriture simple et concise de l'écrivain nous fait apparaître ces enchaînements constants comme parfaitement logiques. Finalement, leurs chemins se croisent et leurs destins se mêlent parfois pour mieux se défaire, ces chassés-croisés étant sous la forte influence du cours des événements.


S'ajoutant aux nombreuses intrigues fictionnelles et aux descriptions martiales, interviennent des apartés parfois très longs de l'auteur (ce qui n'est pas forcément mauvais), qui disserte majoritairement sur l'Histoire et l'angle par lequel cette science est abordée par ses contemporains, et critique la méthodologie qui consiste à ne considérer les événements historiques uniquement à travers le biais des grands personnages, et par conséquent comme étant des purs produits de l'action d'individus ou de groupe d'individus au "pouvoir" (notion dont il remettra d'ailleurs en cause la définition et l'existence même). L'on découvre donc des réflexions philosophiques sur le sens de l'Histoire, en admettant qu'il y en ait un, dont découlent également des questionnements sur le libre-arbitre.


Le tout condensé est, pour un lecteur inaverti qui serait réticent aux paraphrases ou à la longueur même des récits et des descriptions (superflue pour certains mais essentielle pour d'autres) si ce n'est peu attirant, pour le moins repoussant. Il est vrai que par moments, surtout lors des restitutions des différentes batailles, j'ai été prise d'un accès d'ennui profond, tant je ne ressentais aucune émotion (ce qui est probablement dû au ton purement mécanique et tactique pris volontairement par l'auteur) Mais c'est bien la seule raison qui me pousse à enlever un point sur l'échelle de la perfection à ce chef-d'oeuvre monumental de la littérature.


Enfin, tout ça pour dire que c'était quand même vachement bien, et que comme je l'ai lu dans certaines des (très bonnes) critiques déjà écrites sur ce livre, sa longueur n'a eu sur moi qu'un effet positif dans le sens où elle m'a permis une immersion totale dans la société russe du XIXe, et ses intrigues et ses passions. On grandit et on évolue avec les différents persos, qui nous touchent par leurs petites histoires banales mais pourtant importantes : et c'est d'ailleurs bien le propos de Tolstoï, l'histoire avec un grand H, c'est la conjonction de toutes ses destinées individuelles prises ensemble.


> Tant qu'on écrira l'histoire des individus - des César, des Alexandre, des Luther ou des Voltaire - et non pas l'histoire de TOUS les hommes, de TOUS ceux, sans une seule exception, qui ont participé à l’événement, il est absolument impossible de décrire le mouvement de l'humanité [...]


Si tu es arrivé jusqu'ici, la bise ! (et à mon avis tu as réussi puisque t'as quand même lu le pavé dont on parle sur cette page lol)

ielref
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le 8 août 2020

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Feriel Ha.

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