Un avant-goût :
Dans le cadre du Japon féodal du XVI ème siècle,Tanizaki narre tantôt avec un champ lexical historique tantôt plus intimement, l’histoire du fictif sire de Musashi. Á 13 ans, Hôshimaru, issu d’une famille guerrière, n’étant pas en âge de prendre les armes sur le champ de bataille, est retranché dans le château assiégé par un clan adverse.
Avide de prouesses guerrières, il assiste à une cérémonie rituelle pratiquée par des femmes, consistant en un lavage, coiffage et étiquetage de têtes tranchées d’ennemis. Le renom d’un guerrier étant en partie tiré de la richesse du panel de têtes arrachées.C’est par la vision d’un visage dépourvu de nez nommé « tête de femme » symbolisant le déshonneur suprême pour le cadavre et la preuve de succès du combattant survivant, que se révèle la nature sadique du héros.
Le contraste de la scène partagé entre la morbide « tête de femme » et le tendre doigté avec lequel une jeune fille la manipule, éveille les penchants érotiques d’Hôshimaru. Cette expérience sensorielle d’enfance se mue en un fantasme aux accents perversement macabres qui est à l’origine de son secret régissant toute l’histoire du sire de Musashi.
Mon opinion :
C’est la première fois que je me frotte à la plume de Tanizaki et je dois confesser que son maniement fluide, limpide et subtil n’ont pas manqué de me piquer. L’alternance maitrisée des points de vue narratifs offre plusieurs angles d’attaque pour aborder le récit enrichissant la lecture. Le livre se dévore d’une traite et ce en dépit de la potentielle confusion suscitée par la mention de multiples noms de personnes, de lieux et d’époques en japonais, du moins, pour un francophone découvrant la littérature du pays du soleil levant. L’auteur nous livre un alliage oxymorique d’une rare adresse ; au point d’être stupéfait de se prendre au jeu «sadomasochiste » du héros.
En point de comparaison à mon unique repère dans la littéraire japonaise contemporaine, à savoir Mishima, je dénote un talent équivalent avec peut-être un attrait moins prononcé pour l’exploration en profondeur des thématiques abordées dans ce livre de Tanizaki. Cette impression est probablement le fruit de ma progression plus poussée dans l’oeuvre de Mishima, c’est pourquoi, il me tarde de pénétrer dans l’univers de Tanizaki que je pressens aussi exquis que « Histoire secrète du sire de Musashi ».