Les Trois Filles Seules - et le lecteur plus seul encore

Je découvre Mauvignier avec ce roman, et je crois que je n'ai jamais été aussi frustré par un auteur. J'ai lu dans quelques critiques que son style était très différent dans ses autres livres, il faudra bien un jour que je m'y colle, et que je compare un peu tout ça.


Mais ici, quelle asphyxie ! Le bon Laurent ne peut pas s'empêcher, dans un mauvais ersatz de Nouveau Roman, de nous livrer des phrases télescopiques et non télescopées, qui se déploient à l'infini et nous enserrent dans leurs filets. Son style fait assez bizarrement le double effet de nous étouffer et de nous entraîner, comme des sables mouvants dans lesquels on peinerait à marcher, mais qui nous entraîneraient tout de même plus avant dans notre trajectoire. En somme, la lecture de ces 640 pages est tout à la fois pénible et rapide.


Rapide, parce qu'on a quand même envie de savoir la suite (tout en la connaissant déjà, et en sachant qu'on sera déçu) et que quelques fulgurances livrent certains moments de légèreté et d'inspiration, notamment dans les récits indirects des passés de chaque personnage, qui font preuve d'un regard social assez fin de l'auteur.

Pénible aussi - et malheureusement surtout - avec ce style haletant, ces phrases interminables et construites n'importe comment. Le rythme de la lecture est haché, chaque virgule est épuisante. Dès le début du récit, on marche à tâtons et à contrecœur dans ce hameau des Trois Filles Seules, ce qui esquinte un peu l'effet cherché par l'auteur d'une obscurité et d'une tension progressives.


Tout ça est un peu dommage. Le livre me faisait de l’œil depuis plusieurs semaines dans les librairies, avec son titre accueillant, sa quatrième un peu énigmatique, et les passages survolés qui ne me semblaient présager que du bon.


"On ne m'y reprendra plus", ai-je envie de dire. Je sais malgré tout qu'on m'y reprendra, et tant mieux mine de rien : c'est aussi comme ça qu'on fait de bonnes découvertes ! Et je laisserai au moins une deuxième chance à Mauvignier, si par hasard je tombe sur un autre de ses romans.

Loyola777
4
Écrit par

Créée

le 9 janv. 2024

Critique lue 11 fois

Loyola777

Écrit par

Critique lue 11 fois

D'autres avis sur Histoires de la nuit

Histoires de la nuit
lireaulit
2

Critique de Histoires de la nuit par lireaulit

« Histoires de la nuit » m'a fait l'effet d'avoir un chewing-gum accroché à mon talon par une chaude journée d'été : vous savez, le truc énervant qui colle, s'étire, se distend,...

le 21 déc. 2020

7 j'aime

Histoires de la nuit
Cinephile-doux
3

Le hameau de la peur

Tout est au ralenti dans Histoires de la nuit. Les actes mais aussi les pensées des différents personnages, leurs sentiments dans la situation de crise qui constitue le cœur du dernier roman de...

le 25 nov. 2020

7 j'aime

Histoires de la nuit
Cortex69
8

Histoire extraordinaire

Jusqu’à aujourd’hui je n’avais lu qu’un seul livre de Laurent Mauvignier – Dans la foule, un ouvrage publié et lu en 2006 dont je n’ai gardé qu’un souvenir mitigé. Mais les critiques élogieuses...

le 13 sept. 2020

4 j'aime

2

Du même critique

Fargo
Loyola777
8

These guys are dangerous.

Très certainement le meilleur film des frères Coen que j'aie vu pour l'instant. L'intrigue, sans entrer dans une stérile complexité comme c'est souvent le cas pour ce genre de films, est originale et...

le 23 oct. 2017

9 j'aime

6

Merci la vie
Loyola777
4

"Les larmes qui coulent c'est pas toujours des larmes de bonheur"

Bertrand Blier est sans conteste un cinéaste génial, qui a su nous pondre des films comme Buffet Froid, Tenue de Soirée, les Valseuses ou Calmos, qui ont en commun un sens de l'absurde qui s'insinue...

le 7 juin 2019

7 j'aime

1

Scènes de la vie conjugale
Loyola777
5

Un cierge éteint...

Je suis à un peu plus de la moitié du film alors que j'écris ces lignes ; je n'ai pu m'empêcher de commencer à rédiger ces quelques mots sans même avoir encore achevé l'oeuvre. Une conversation...

le 30 août 2018

7 j'aime

20