Le style de Lydie Salvayre surprend les premières pages, son rythme peut dérouter, embarrasser, de même que la parole, crue, sans ambages et presque froide. Cependant petit à petit, crescendo sa voix s'élève, se réchauffe et électrise le lecteur jusqu'à la dernière note.
Hymne est-il une biographie romancée de Jimi Hendrix ? Pas seulement. Avec le 18 août 1969 pour refrain, date de l'éclat de The Star Spangled Banner, l'hymne américain réinterprété par Jimi, Lydie Salvayre brosse le portrait d'une Amérique violente, méprisante, brutale, orageuse, raciste. Génocide des Amérindiens sous Jackson (années 1830), guerre du Vietnam, haine des plus pauvres, abomination des Noirs américains pendus, insultés, moqués, décriés, ignorés...
« Southern trees bear strange fruit
Blood on the leaves and blood on the root
Black bodies swinging in the southern breeze
Strange fruit hanging from poplar trees »
Billie Holliday le gémissait magistralement en 1939, et Lydie Salvaire rappelle les hurlements de Jimi Hendrix contre l'horreur, ses hurlements de même force en faveur de la Beauté.
Jimi Hendrix, timide, modeste, généreux, artiste de génie, est l'une des victimes de cette Amérique venimeuse à l'idéal monochrome.