"Il a pris un canard dans la tête à deux cents cinquante noeuds"
William Gibson dit de lui-même qu'il a "passé autant de temps à écrire qu'un américain moyen de son âge a passé de temps devant la télévision". Cela laisse un peu rêveur, mais c'est dire si l'écriture est une seconde nature pour lui. Cela se ressent dans son style si particulier, dans ses textes très travaillés, mais toujours d'une grande qualité.
"Identification des schémas" commence par dérouter méchamment. Il faut dire que cette fille qui, dès les premières pages, explique sa perception du décalage horaire par le fait que son âme voyage moins vite que son corps en avion, cette fille qui est allergique aux logos des marques et frise la crise de panique quand elle croise le bibendum de Michelin, on a un peu envie de la prendre pour une dingue. Mais peu à peu, la magie de Gibson opère, séduit irrésistiblement. Et on s'attache à ce petit bout de femme fragile et résistant à la fois, dont le père a disparu le 11 septembre, et qui lutte contre ses phobies à coup de "il a pris un canard dans la tête à deux cents cinquante noeuds". C'est à la fois hilarant et émouvant, et on retrouve là toute l'intelligence d'écriture de Gibson, distillée dans tout le roman, et grâce à laquelle il nous convainc sans peine de le suivre dans cette enquête originale à l'heure des débuts d'Internet (on est en 2002, et l'évocation de Netscape, par exemple, fait sourire et rappelle quelques souvenirs pourtant pas si lointains - mon Dieu que ça va vite !).
Une belle découverte, donc, et je vais m'empresser d'aller lire la suite (Code source).