Ilium, écrit par l'excellent Dan Simmons (Le Cycle d'Hypérion) est un bon gros pavé qui mélange à la fois la fantasy, la Science-Fiction le péplum et la dystopie. Rien que ça !
En bref : la terrible, célèbre, grandiose guerre de Troie bat son plein. Enfin, sa réplique martienne en tout cas. Car les Dieux de l'Olympe s'ennuient... A l'aide de leur technologie quantique, nano-robots et de leur toute-puissance ils ont recréé la guerre de Troie : ville, peuples et héros tout compris. Maintenant ils observent le résultat en utilisant des observateurs humains chargés de comparer la réalité au récit d'Homère... Et en trichant allègrement pour faire triompher les pions de leur faction. Pendant ce temps, sur Terre, les post-humains quasi-immortels et décadents profitent tranquillement de leur vie inutile sans se douter une seconde de la catastrophe qui s'apprête à leur tomber dessus. Ajoutez à cela des petits hommes verts, des robots férus de littérature, une tonne de complots et autant de situations rocambolesques et vous aurez une bonne idée de ce qu'est Ilium, revisité par Simmons !
Il est difficile de parler d'Ilium sans spoiler allègrement des moments clés de l'intrigue. Après son cycle d'Hypérion mainte fois récompensé, l'auteur était impatiemment attendu au coin du mur par ses lecteurs : il s'agissait de ne pas se rater. Pour moi en tout cas il a réussi à relever le défi.
L'histoire narrée dans Ilium est prenante, très dense, souvent violente. Et pourtant, le ton principal du récit c'est sans doute un certain sentiment de désabusement. Ce qui est totalement volontaire et apporte même un humour jaune sur les bords. Il y a par exemple le pauvre Thomas Hockenburry, anciennement professeur en littérature ancienne, et réincarné par Aphrodite pour l'occasion dans le but de lui servir d'observateur. Regarder pendant dix ans en grandeur nature une des œuvres à laquelle il avait consacré sa vie aurait pourtant pu être exaltant. Le fait d'être menacé à la moindre incartade d'extermination tempère sans doute ses ardeurs, tout comme les incursions des Dieux dans une histoire bien huilée, mais totalement artificielle...
Quand les Dieux se chamaillent comme des enfant**s sous la supervision (de plus en plus agacée) de Zeus, que les grands héros sont en fait des pions, que **les observateurs ne rêvent plus que d'agir - enfin ! - ou de coucher avec Hélène de Troie, la situation peut très vite dégénérer !
Sur Terre, la situation parait plus calme de prime abord. Le début en tout cas est certainement plus lent à démarrer. On met en place progressivement les personnages, ces satyres indolents n'ayant rien à faire de leur journées. Cette inactivité va d'ailleurs être la source de nombreuses questions sans réponses. Comme par exemple qui sont d'où viennent) leurs dociles serviteurs humanoïdes ? Que ce passe t'il dans ces fameux centres mystérieux leur garantissant une jeunesse et une santé parfaite, capable au besoin de les "recréer" à neuf ? Qui contrôle ce système étrange leur garantissant cent années de vies et pas un jour de plus ? Et bordel pourquoi ne reste-il plus que quelques milliers de gens sur Terre et où sont passés les autres ?!
Ces deux branches principales dans la narration, bien que très différentes, finissent évidemment par converger (l'indice subtile qui était présenté en faveur de cet argument : elles étaient dans le même livre). On découvre petit-à-petit le contexte considérable les englobant et les réunissant en une seule et même épopée étrange et passionnante (même si pour une réponse complète il faudra lire le tome 2, Olympos)
Malgré mon amour de l'œuvre, je dois cependant préciser quelques points. Il est préférable d'avoir une bonne culture antique pour apprécier l'histoire. Et même indispensable d'en avoir au moins entendu parler ! Bien sûr l'auteur nous offre suffisamment de repères et d'explications pour ne pas être perdus, cependant si initialement vous n'avez aucune idée de qui est Achille, ce qu'était Troie, pourquoi tout le monde veut se faire Aphrodite et surtout qui est ce vieux colérique de Zeus que tout le monde tient tant à garder calme... passez votre chemin ! Il n'est pas besoin d'être un expert pour apprécier Ilium, mais plus vous êtes familiers de l'univers qu'il dépeint, plus vous serez à même de passer un bon moment (certaines références subtiles/drôles passent inaperçues autrement).
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