[écouté en audiolib]
Quand on a écrit Shutter Island ou Mystic River on ne peut se contenter d'un récit aussi classique. C'est le principal reproche que je dois faire à Denis Lehane qui nous propose avec "Ils vivent la nuit" sa saga mafieuse, un grand classique du polar écrit ou au cinéma.

En prenant pour cadre les années 20-30, celle de la prohibition, Lehane nous plonge dans son Boston, dans le quartier de Charlestown où l'on va suivre les premiers faits d'arme, puis l’ascension de Joseph "Joe" Caughlin au sein de la mafia. Le roman prend tous les atours de la saga, puisqu'on va suivre Joe sur plusieurs années, on va vivre ses expériences amoureuses avec lui ainsi que ses moments de gloire et ses échecs.

Ce qui qualifie Joe pour être un bon héros de roman c'est qu'il n'est pas issu de la filière conventionnelle des mafieux, aucun village de Sicile n'a vu naître ses ancêtres, il n'a pas réellement d'amis dans le réseau, ni de contact. Il est l'archétype du fils de bonne famille qui se tourne vers d'autres desseins que ceux auxquels son père le prédestinait. D'origine Irlandaise, fils d'un capitaine de police, d'un naturel bienveillant et n'ayant pas particulièrement de propension à la violence, Joe va se faire remarquer par un sens des affaires et une intelligence qui l'aideront à se faire un nom auprès des "patrons" et à se sortir des innombrables emmerdes dans lesquelles ils s'enlise.

Denis Lehane écrit bien, cela n'est plus à prouver, par conséquent c'est un semi échec que de voir une histoire si conventionnelle, le terreau était pourtant parfait, et son ambiance faisait un décor idéal, entre costumes rayés et chapeaux mous, échanges de coup de feu à la Thompson et passage de Rhum en bateau dans le Golfe du Mexique ou dans l'arrière boutique d'un commerce de façade pour jouer au poker dans les volutes de fumée des cigares au bon tabac de Cuba.

Le principal problème de ce bouquin c'est malheureusement que son héros est niais. Trop gentil et trop mièvre, il en devient du coup trop prévisible. Un parrain qui tombe amoureux comme une midinette c'est tout de même embêtant. Ce qui est étrange c'est que la plupart des personnages annexes sont bien plus complexes et remplissent le livre d'une toute autre façon (Emma , Dion, Maso, White ...). Autre point étonnant, dès que le roman s'éloigne de Boston, pour aller du côté de la Floride ou de la Havanne, on sent l'auteur moins impliqué, il en oublie que la ville était un élément important au début du roman.

Un livre agréable mais sans étincelle, même si l'ambiance fonctionne à merveille, on peut en attendre bien plus de l'auteur: 6/10
[La version audiolib est très correcte sans être exceptionnelle, à noter que pour une fois les quelques secondes de musique ne sont pas horripilantes car utilisées à bon escient]
Nanash
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le 23 oct. 2013

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le 23 oct. 2013

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Nanash

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