Dennis Lehane. La prohibition aux Etats-Unis. La Mafia. Il n’en fallait pas plus pour me convaincre d’entamer l’histoire de Joe Coughlin, petit voyou des bas-fonds de Boston rêvant de devenir l’un des trafiquants d’alcool les plus importants de Floride. Toute la première partie du bouquin, jusqu’à son arrivée à Tampa, est excellente. On s’attache très rapidement à ce truand au grand cœur. Son cœur brisé, le conflit avec son père policier, ses premiers contacts avec les chefs de la pègre. L’écriture de Lehane est extrêmement fluide, très influencée par les classiques de la littérature mais surtout du cinéma si bien qu’on évolue en terrain connu mais avec beaucoup de plaisir.
Vient alors la seconde et principale partie du livre qui m’a laissé sur ma faim. Ce n’est pas tant le fait que l’histoire est d’un classicisme absolu si bien qu’on voit arriver chaque évènement, chaque trahison, chaque coup d’éclat une bonne cinquantaine de pages à l’avance. Non il s’agit plutôt de la volonté de l’auteur de rester en surface et de ne proposer qu’un rise and fall de plus. Ils vivent la Nuit veut parler du trafic d’alcool durant la prohibition, il ne nous en montre pas les rouages. De plus, la montée en puissance de Joe n’est que trop partiellement décrite pour laisser place à ses histoires de cœur. On ne ressent jamais le risque, le pouvoir, l’organisation de tout ça. A quelques exceptions près, tout marche comme sur des roulettes pour nos gangsters jusqu’au retournement de situation avant le final. Lehane est passé à côté de son sujet et je me mets à rêver de ce que cette histoire aurait pu donner dans les mains d’un jusqu’au boutiste à la Ellroy. Probablement quelque chose d’un peu moins propre sur lui également. La volonté de l’auteur d’humaniser au maximum ses personnages nous fait trop souvent oublier que ce sont avant tout des ordures et des traitres en puissance.
Loin de moi l’idée de déconseiller Ils vivent la nuit. Ca se lit rapidement et avec plaisir mais sans passion. Une lecture en pilote-automatique. Ca aurait pu être tellement mieux.