Ashes to ashes
Voilà un film qui divise, auquel vous avez mis entre 1 et 10. On ne peut pas faire plus extrême ! Rien de plus normal, il constitue une proposition de cinéma très singulière à laquelle on peut...
le 5 déc. 2015
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Que peut-on espérer dans un monde où la justice n'avait plus aucune signification et où l'homme était nu comme un spectre ? (...) Quand il s'agissait de révéler les petits secrets du pouvoir, l'opacité était de mise, mais quand il fallait surveiller la plèbe, c'était un tout autre discours. Fichage généralisé, traçabilité du citoyen, télésurveillance, une société de plus en plus sécuritaire.
Toute ressemblance entre la cyber-dystopie imaginée par Christine Deviers-Joncour et le début du XXIème siècle serait bien entendu purement fortuite. Toutefois, le discours porté par le big boss (Laurus Shield) de ce" meilleur des mondes"- mélange de 1984 et de Fahrenheit 451- évoquera sans doute aux plus "complotistes" d'entre nous les plus "beaux" discours de Klaus Schwab, Jacques Attali ou d'Ursula Von der Leyen. La présence d'une pyramide surmontée d'un œil lors de la réunion des huiles n'échappera à personne- ce symbole maçonnique, largement repris par Macron, est connu de tous.
Le titre annonce la couleur et sous quelle égide se place le récit : "In silico" est un néologisme d'inspiration latine désignant une recherche ou un essai effectué au moyen de calculs complexes informatisés ou de modèles informatiques. Cette expression est surtout utilisée dans les domaines de la génomique et la bioinformatique." Il sera donc question d'expérimentation cyber(gé)nétique à base d'intelligence artificielle, pour résumer.
L'auteur, qui fut surnommée "la putain de la République", aggrave son cas "conspirationniste" avec ce cauchemar littéraire au-delà du réel qui nous fait entrer dans un sombre univers carcéral, "In silico", régi par des ministères de la Surveillance et de la Propagande. Un monde orchestré par des médias et une justice à la solde d'un pouvoir tyrannique qui a toujours un œil sur ses esclaves (via une sorte de Big Brother installé dans chaque appartement et appelé "Bébé œil"). Un monde sans arbre ni fleurs, fondé sur l'arbitraire et la servitude volontaire où l'on enferme les propriétaires de livres, par exemple.
Elem, une jeune femme rebelle, aidée d'un mystérieux garçon croisé au hasard d'une traversée du miroir, va tout tenter pour percer les secrets de cet enfer et tenter de libérer ses semblables au péril de sa vie (elle devient vite l'ennemie numéro 1, pourchassée comme dans Fahrenheit 451).
Nous suivons les personnages évoluant parmi des visions et des paysages qui m'ont parfois semblés naïfs et éculés : on trouve dans le monde "positif" (appelé Avilion, écho à Avallon ?) des licornes, des lumières nacrées et des pianos ; dans la cité infernale, In silico, ce ne sont que trottoirs poisseux, grisaille et chape de plomb. Une conception binaire classique, mais plutôt efficace car bien connue des lecteurs.
L'écriture de la romancière, bien qu'agréable et offrant de jolies références (Nerval, Yeats), n'échappe pas à une forme de candeur un peu mièvre, au lyrisme plutôt convenu. Des parallèles un peu trop attendus (comme le rêve du papillon de Tchouang-tseu) et une forme d'angélisme touchant qui aurait gagné à sortir un peu des sentiers rebattus par les grands titres de la SF.
La fin curieuse, qui hésite à verser dans l'optimisme et le confie, utilise la mise en abyme, procédé romanesque classique mais ici trop rapide pour être bien compris dans ses intentions. J'ai noté par ailleurs quelques coquilles que l'éditeur aurait gagné à repérer avant publication.
En résumé, un roman SF pas forcément original mais qui se lit sans déplaisir, comme on parcourt avec soulagement un diagnostic qui arrive aux mêmes conclusions que nous et nous fait nous sentir moins seuls.
Une phrase sur laquelle méditer actuellement, d'un philosophe inconnu cité dans le livre :
Notre appartenance au monde des images est plus forte que notre appartenance au monde des idées.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Je ne connais rien à la SF mais je me soigne et Eblouissements littéraires [2022]
Créée
le 14 sept. 2022
Critique lue 36 fois
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