Ce roman est le 5eme opus du magistral cycle de Culture. Et contrairement à ce que j’ai pu lire dans certaines critiques, il trouve entièrement sa place dans le cycle, Contact et Circonstances spéciales étant omniprésents bien qu’invisibles au premier abord. Il est impossible de lire ce roman sans avoir lu un ou plusieurs des précédents. La part belle est faite aux non-dits et aux interprétations du lecteur, aussi la suite de cette critique s’adresse uniquement aux personnes ayant déjà lu le livre, pour comparer ma compréhension à la leur. Donc attention spoiler, si vous n’avez pas encore lu le roman, fermez votre ordi et plongez vous dans le le livre !
L’histoire se déroule sur une planète dont l’évolution se trouve au niveau d’un moyen-age féodal. Un empire imprime sa chappe de plomb sur les différents royaumes vivant dans l’obscurantisme propre à cette époque, ralentissant sa voie vers le progrès. Deux agents de la culture se penchent sur le cas de cette planète, faut-il l’aider à accélérer son développement, ou au contraire faut-il la laisser se débrouiller toute seule ? Après de vives discussions, ils s’en remettent à leur supérieur, qui prend la décision de l’intervention. Comme on ne fait pas d’omelettes sans casser d’œufs, celle-ci prend la forme d’une pluie de météorites qui détruit une partie de l’empire et au passage des millions de civils innocents. Mais c’est pour le bien de la planète ! Un agent des Circonstances spéciales, Vossil, n’est autre que celle qui poussait vers l’intervention. Elle se rend peu à peu indispensable à un puissant roi et le pousse par légères touches vers le progrès social, tout en apportant une science médicale jusqu’alors inconnue qu’elle va instruire à son apprenti, qui lui-même sera à l’origine de son développement spectaculaire au fil des années. Mais le capitaine de la garde, Adlain, et ses ducs Wallen et Urlesile ne voient pas cette femme d’un bon œil. Déjà parce qu’elle est une femme, étrange, mystérieuse, et qu’elle casse les codes permettant à ces nobles de régner en maitres absolus. Vossil qui espionne leurs conversations par le biais de sa technologie avancée n’a d’autre choix que de se débarrasser des gêneurs pouvant ralentir sa mission. Elle assassine de sang-froid le bourreau et le duc qui complotent contre elles, puis, moins méfiante elle se fait capturer par Adlain et deux autres ducs. Elle n’échappe au viol, à la torture et à la mort que grâce à son mini drone, une petite arme minuscule prenant l’aspect d’une perle sur le vieux poignard émoussé qu’elle ne quitte (presque) jamais. C’est sans doute aussi avec cette arme qu’elle a assassiné ses 2 précédentes victimes, et qu’elle a fait arréter le cœur du roi pour qu’on vienne la sortir de la chambre de torture où elle était enfermée. Après ce bain de sang elle ne peut plus décemment continuer sa mission, elle part la mort dans l’âme sur un galion duquel elle sera téléportée au cours du voyage par circonstances spéciales. Son action durant ses 3 ans de mission aura malgré tout porté ses fruits, et le royaume du roi Quiensce deviendra un des plus beaux et des plus éclairés, apportant une nouvelle ère de progrès, de renaissance et de prospérité.
Dewar, quant à lui, est l’agent de Culture prônant la non intervention. Il suit de quelques mois son ancienne amie, mais lui c’est sur le Protecteur qu’il porte son (non) action. Ce Protectorat est le synonyme du statu-quo, du possible retour vers un empire féodal rétrograde. Dewar ne va pas chercher à tout prix à maintenir ce Protectorat, comme Vossil essaye à tout prix de faire évoluer le progrès de son côté. Non, il n’agit pas, il se contente de protéger Urleyn, le Protecteur qui a remplacé l’empereur éradiqué initialement par Culture. Sa mission est toute sa vie, il dot protéger la vie d’Urleyn, pour que l’ancienne voie de la planète ait une chance de se développer.. ou pas. Cela n’est pas son affaire, il veut juste s’assurer que plus rien d’extérieur ne va peser dans la balance du destin de la planète. Lui aussi peut se sortir de certaines situations difficiles grâce à sa technologie, mais il ne le fera qu’une fois, pour faire exploser avec une mini-bombe le mur derrière lequel il surveillait Urleyn. Hélas sa mission va échouer, les esprits retors de la guerre, de l’espionnage, et de la souffrance qu’elle engendre, étant plus forts que tout. Sa mission terminée elle aussi dans un bain de sang qu'il n'aura pu empécher, lui par contre préfère rester sur la planète, auprès de la femme dont il est tombé amoureux au cours de sa mission, et qui n’est rien d’autre que la meurtrière du Protecteur, qu’il décide de pardonner une fois les enjeux politiques perdus.
Voilà, à aucun moment Vossil et Dewar ne vont se croiser.
Voilà, une fabuleuse galerie de personnages profonds et complexes participant tous de près ou de loin aux différentes intrigues.
Des morceaux de bravoure le soir du bal d’été où Vossil passe de partenaire en partenaire sous l’oreille attentive de son apprenti espion, une partie de guerre miniature avec le fils de protecteur, l’angoisse des salles de torture, et le final dans le harem enfin ouvert à nos yeux ébahis…
Un bien grand roman, qui comme souvent chez Banks, met un peu de temps à démarrer. L’auteur étant avare d’explication, il faut toujours un certain temps avant de comprendre les personnages, les enjeux, l’intrigue… Au bout de 100 pages je me suis dit que j’allais avoir du mal à finir le roman et que je ne lirai plus la suite du cycle. Puis j’ai enchainé les soirées où je lisais 2 chapitres en me disant que ce sacré Banks était quand même excellent, et j'ai fini d’une traite les 60 dernières pages en me délectant du final grandiose et de l’épilogue non moins grandiose.
La seule question qui subsiste pour moi est le sens du titre « Inversions ». Peut-être parce que les 2 protagonistes ont des buts opposés. Ou peut-être que Vossil démarre dans l’aide et la compassion pour finir dans un carnage qui causera son départ précipité, alors que Dewar, guerrier intransigeant dans l’âme, finira par pardonner la trahison de la femme qu’il aime plus que tout. Si quelqu’un a d’autres idées, merci de les mettre en commentaire à ma critique !
Vivement « Trames » !!!