Ce roman de Stefan Zweig est très différent de ses autres nouvelles : plus long et plus sombre ; son style est lent et traînant, moins vif et passionné. Le récit est découpé en deux parties : l’une est plutôt gaie et raconte le voyage de Christine en Suisse, sa jeunesse retrouvée, la découverte des belles choses, des émois amoureux. La seconde raconte son retour en Autriche, à sa vie commune et miséreuse, sa rencontre avec Ferdinand.

Ce livre m’a complètement plombé le moral : la pauvreté et la misère y sont considérées comme des états définitifs, la société décrite par Zweig est sans espoir, la génération de l’entre-deux-guerres est sans espoir, elle se méfie de l’Etat autant que de ses proches, … et, surtout, le bonheur semble dépendre entièrement et uniquement de l’argent possédé. Tout cela a contribué à créer une atmosphère lourde, putride, démoralisante. De même, les solutions radicales envisagées par Christine et Ferdinand pour sortir de la pauvreté et du malheur donnent du caractère et de la profondeur au roman, mais contribuent aussi à anéantir toute forme d’espoir.

Le personnage de Christine est très travaillé, son évolution est réfléchie et minutieusement décrite, j’ai beaucoup apprécié suivre sa transformation tout au long du roman. Son personnage est plutôt lâche, elle n’a pas le sens de l’initiative et ne peut pas prendre de décision : elle laisse les autres le faire à sa place, docilement. Sa fragilité et sa naïveté la rendent pourtant assez attachante, ou suscitent du moins la pitié, même si j’ai parfois eu envie de la secouer, de la prévenir qu’elle courait à sa perte ou qu’elle faisait les mauvais choix… Je ne pense pas que ce soit un personnage qui puisse laisser le lecteur indifférent, malgré son manque de caractère. J’ai aimé la voir influencée par les différents lieux dans lesquels elle était et par son entourage à différents événements de sa vie.

Même si ce roman est très sombre, je l’ai beaucoup apprécié : la première partie est très entraînante, la description des émotions de Christine et de leur intensité est très rythmée, très fraîche et naïve, la deuxième partie est beaucoup plus triste mais tout aussi intéressante, on plonge avec Christine dans l’amertume et l’agressivité.

Ce roman n’est donc pas léger du tout, mais très intéressant à lire. L’histoire est originale et plaira sûrement aux amateurs de romans ayant une touche historique, ainsi qu’aux lecteurs qui apprécient les profils psychologiques intéressants, et les transformations que les personnages peuvent subir en fonction du contexte historique et social.
Une chose est sûre, ça n’est pas l’œuvre de Zweig que j’ai préférée lire, mais j’ai aimé le trouver dans un style assez différent de celui qu’il a habituellement, et j’ai aimé voir son écriture, son rythme et son ton s’adapter à l’histoire qu’il racontait. Une découverte surprenante.
ulostcontrol
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le 19 août 2014

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