"Jean de Florette" est la première partie d'un ouvrage de Pagnol dont le nom est "l'eau des collines".
Le curieux dans cette affaire est que Pagnol en 1952 avait réalisé un film en deux parties "Manon des sources" puis "Ugolin". Sur un scénario qu'il avait écrit lui-même. Ce n'est que dix ans plus tard que Pagnol a écrit l'ouvrage "L'eau des collines" sur les mêmes bases.
L'écrivain Marcel Pagnol, c'est quelqu'un que j'ai découvert à l'âge adulte (vers 25 ans). Avant, je connaissais bien quelques films, qui passaient régulièrement à la télé, tirés de ses pièces de théâtre et n'étais pas plus emballé que ça. Mais lorsque je suis tombé sur "les souvenirs d'enfance" d'une part et "l'eau des collines" d'autre part, j'ai vraiment pris la mesure de la qualité et de l'originalité de cet écrivain.
Et pour revenir à Jean de Florette, le style de Pagnol y est très sobre et empreint de poésie. Très facile à lire. Sans être rébarbatif car Pagnol y introduit des éléments de langue parlée localement avec des expressions typiques dont on entend l'accent du midi. On pourrait presque dire qu'il adapte la langue aux personnages suivant leur condition. Ceci donne une grande fluidité à la lecture dans la mesure où le lecteur reconnait facilement le personnage aux expressions employées.
L'histoire de ce roman raconte les manigances de deux paysans (le Papet et Ugolin) pour s'emparer d'une propriété dont a hérité Jean Cadoret (fils de Florette), marié à Aimée et père d'une petite fille, Manon.
C'est une histoire âpre comme l'est la Provence aride sous un soleil de plomb. Et ce contraste est saisissant entre l'arrière-pays de Marseille qui est une splendide campagne à la végétation luxuriante et sauvage que décrit Pagnol magnifiquement, la mentalité des paysans très fiers, peu causants et très regardants et l'enjeu de l'eau qui peut apporter la vie ou tuer si elle vient à manquer.
Le livre est quand même assez manichéen et les personnages très contrastés. L'âme du couple Papet/Ugolin est d'autant plus noire que les apparences que détaille Pagnol sont plus trompeuses. Et l'âme de la petite famille de Jean de Florette est d'autant plus lumineuse qu'elle est manipulée et trompée.
Le roman, même après plusieurs lectures, reste passionnant à lire et à décrypter les différents personnages. Il est évident que Pagnol, avec un art consommé, fait basculer le lecteur tout entier vers le candide Jean de Florette et surtout l'innocente Manon qui termine le roman par un "cri désespéré, strident et monotone, que les échos renvoyaient à travers les pinèdes".
Le papet qui sait tout, très philosophe, dira : "ça, c'est un lièvre que la buse vient d'emporter"