Jeu blanc est la traduction française du roman "Indian Horse" de l’écrivain canadien Richard Wagamese du peuple autochtone des Ojibwés au N-O de l’Ontario. Cette histoire, très largement autobiographique, retrace le parcours d’un petit Amérindien recueilli par les Blancs et placé au St Jerome’s Indian Residential School, un de ces pensionnats indiens subventionnés par l’Etat et dirigés par l’Eglise dont le but était de convertir ces jeunes âmes au catholicisme et les assimiler à la culture canadienne.
La réalité sera éprouvante : parqués comme du bétail, roués de coups, affamés, obligés de travailler et punis pour la moindre vétille, quelques-uns n’y survivront pas et tous garderont en mémoire la peur terrifiante du plancher qui grince la nuit sous les pas furtifs des prêtres et des sœurs, les cris de détresse et les grognements des adultes sous les draps. « C’est l’amour de Dieu » expliquaient-ils.
Saul, très tôt, se découvre une passion pour le hockey où il excelle. C’est sa fuite, son abandon, sa rédemption. Sans ce sport la vie ne serait plus possible. Très vite remarqué il va peu à peu gravir les échelons jusqu’à tutoyer le gratin du hockey canadien. Mais plus que contre des adversaires sportifs, c’est contre des ennemis racistes qu’il va devoir se battre, ces suprématistes blancs qui croient que ce jeu est à eux.
Histoire bouleversante que celle-là qui retrace la vie de ces jeunes autochtones obligés d’oublier leurs coutumes et leurs traditions pour adopter un mode de vie qui n’est pas le leur. Rejetés, haïs, méprisés, ils seront souvent aux prises avec l’alcoolisme, la toxicomanie et le trauma hérité des abus qui ont marqué leur jeune existence.
Sobrement écrit, Wagamese sait nous faire partager les tourments qui habitent son personnage mais sait également magnifier la nature sauvage de ce pays, tout en réussissant à nous transmettre la violence et le racisme qui y a prévalu dans les années soixante. On ignorait que le ‘gentil’ Canada avait lui-aussi participé à ces déviances…
Ceci dit, le hockey reste toujours, pour moi, un sport incompréhensible.