Le talent de Fabcaro pour mettre en scène et en mot des situations de gêne sociale est indiscutable et ce roman en profite indéniablement (plus que les autres ? Je ne sais pas je ne les ai pas lu, je ne connais que ses BD).
Nul doute que les récentes adaptations de ses œuvres au cinéma lui ont permis de mieux apprendre à connaître cet univers aussi exaltant qu'impitoyable. Les prémices de son récit sont donc tout à fait vraisemblables et quiconque à déjà tourné autour de ce milieu reconnaîtra des situations familières.
A travers la forme d'un journal à la première personne Fabcaro nous raconte l'histoire d'un personnage de scénariste en herbe (mais quarantenaire, qu'a t'il fait avant, d'où sort-il ? On ne le saura jamais) qui vient de la signer un contrat avec un producteur autour de son premier scénario "Les servitudes volontaires". Ces "servitudes" sont, telles qu'envisagées par son auteur, un drame romantique intello en noir et blanc interprété par des acteurs bobo. Déjà une forme de caricature plutôt facile. Tout le long du récit son opportuniste producteur, lui aussi plutôt caricatural, ira a la pêche aux investisseurs, forçant au fur à mesure le scénariste à transformer complètement son œuvre jusqu'à ce qu'elle devienne complètement autre chose.
Si Fabcaro avait voulu proposer une satire vraiment pertinente de cet univers il aurait choisi autre chose qu'un auteur débutant de film sentimental et envisagé un développement moins invraisemblable que de voir celui-ci accepter d'en faire une comédie populaire potache. En gros comme si un jeune Christophe Honoré avait accepté de devenir scénariste de Claude Zidi. Mais gageons que ce n'était pas son intention (malheureusement).
Il ne reste donc plus qu'à se rabattre sur les qualités narratives et humoristiques de l'œuvre. Et là je dois reconnaître rester imperméable à une partie des artifices de l'auteur. Il procède par répétition et accumulation. De façon systématique le producteur demande des changements, l'auteur râle, puis les applique. Chaque nouvelle demande, chaque nouveau changement est l'occasion d'une montée en puissance en termes d'absurde et de grotesque. Autour de ça l'auteur voit sa situation personnelle changer depuis qu'il a déclaré écrire un film, mais il n'ose avouer à personne les compromis auxquels il se soumet et s'enferme donc dans un mensonge qui grossit. Le récit se terminera lorsqu'un sommet d'absurdité éclatera et le mensonge avec. Pour autant ce sommet manque de panache, reste dans un entre deux entre vraisemblance et extravagance, qui ne satisfait pas.
C'est finalement l'état intérieur du personnage, son embarras, et sa manière de vivre avec dans son quotidien, qui constitue la vraie qualité du livre. Mais en cela rien de très nouveau pour l'auteur. D'autant plus que cela se limite à une succession de saynètes, de dialogues, qui à part être montée en épingles, répétées, amplifiées, ne débouchent sur rien. Comme certaines de ses BD qui ne valent que part Strip. Une situation par page, c'est très bien et on aura pas mieux que ça.
Pas de réelle portée critique, pas de construction narrative, une évolution de personnage minime. Voilà les limites de ce roman par ailleurs sympathique, qui se lit vite, et qui réussit tout de même, par instants, à force de situations pathétiques, à nous attendrir.