Une œuvre dense, décousue, dont je n’ai pas apprécié l’intégralité. Je dirai que la beauté de ce livre se trouve dans la nostalgie de Genet, nostalgie d’un monde infâme, immoral, parfois sordide mais surtout viril et cruel. Ce journal dresse une véritable « cosmogonie » comme l’écrivait Sartre, constellée de personnages masculins que Genet couvre de fleurs, et enferme dans son bagne d’écriture. Ce journal, si tant est qu’il soit plus qu’une simple succession de fragments de vie, est une ode à la vie simple, au vagabondage et surtout au crime comme perspective de félicité morale.
Dans une perspective spirituelle, Genet rédige sa propre genèse fondée sur des commandements impies, et rend à ces figures déclassées une gloire toute subjective, la gloire du cœur (et du sexe).
Enfin l’on ne peut passer à côté du style de Genet, magnifique, juste et lumineux. Un style qui réussit l’exploit de combiner finesse classique et ornementation baroque … de quoi rendre leur grâce aux quelques voleurs, et autres forbans qui peuplent ce livre.
Maintenant, j’avoue que l’héroïsme constamment brandi, même lorsqu’il s’agit d’un SS, ou d’un violeur, j’ai plus de mal. Alors on me dira que je n’ai pas compris le livre, mais j’ai bien compris ce qu’il essaie de faire et simplement, en tant que lecteur, ça me dérange par moments ou du moins, m’empêche de me laisser complètement transporté …
L’œuvre comporte des passages d’une grande beauté, mais souvent trop courts (au début et à la fin; le milieu étant plus classique d’un point de vue narratif) passant d’un personnage à un autre, d’un lieu à un autre. Il m’a manqué cette langueur que j’affectionne et qui me permet de m’immiscer discrètement dans l’univers d’un auteur.
Un beau morceau de bravoure donc, mais qui aura manqué tantôt d’efficacité, tantôt de patience pour me séduire complètement.