J'ai commencé à lire Stephen King il y a deux ans, et je dois avoir lu une bonne douzaine de ses livres. Je les ai tous aimés, certains plus que d'autres, et Joyland ne fait pas exception à la règle mais il m'a légèrement déçu. Du moins, c'est la quatrième de couverture qui m'aura déçue, et je ne pense pas que l'auteur en soit responsable. Toujours est-il qu'à la vue de l'atmosphère lugubre de la première de couverture et la quatrième qui clamait : "Les clowns vous ont toujours fait un peu peur? L'atmosphère des fêtes foraines vous angoisse? Alors un petit conseil: ne vous aventurez pas sur une grande roue un soir d'orage...", j'ai cru pouvoir y trouver une ambiance angoissante, peut-être comparable à Ca. Tout cela était bien alléchant, si ce n'est qu'il n'y a pas de clown et que l'ambiance de Joyland est tout sauf angoissante, au contraire le parc porte bien son nom. Un peu plus bas, on peut lire "Mêlant suspense, terreur, nostalgie, émotion, un superbe King dans la lignée de Stand by me." Une fois de plus, le livre fait (en partie cette fois) défaut aux promesses de l'éditeur: suspense et terreur sont selon moi absents de ce livre. Heureusement, tout n'est cependant pas que mensonge, le livre est effectivement plein d'émotion et de nostalgie et on est en effet "dans la lignée" de Stand by me.
Je ne vais bien évidemment pas me limiter à cela, car on ne juge pas plus un livre sur la quatrième de couverture que sur la première, mais je tenais à faire part de cette déception. Que l'on ne s'y méprenne: Joyland est un bon livre - ou du moins il n'est pas mauvais -, en témoigne ma note. Les personnages sont bien brossés, particulièrement Annie et Mike Ross ainsi que la narrateur, bien évidemment, la narration se faisant de manière interne et intérieure au récit. L'ambiance de Joyland se veut festive plutôt qu'angoissante, si bien que l'on a presque l'impression de le voir avec nos yeux d'enfants. Comme à son habitude, King parvient à transporter le lecteur dans son monde et, pour l'occasion, c'est le monde de la fête foraine qu'il s'est approprié, principalement par l'usage de ce qu'il appelle la "Parlure", ce jargon purement (et authentiquement) forain.
A l'instar des quatre garçons de Stand by me, Devin Jones veut démasquer le tueur de la jeune Linda Gray dont le fantôme hante la Maison des Horreurs. Plus que ça, il veut voir ledit fantôme, sans pouvoir y parvenir, contrairement à certains. Parmi ceux-ci figurent Mike Ross, le jeune garçon atteint de la cruelle dystrophie musculaire de Duchenne. Peut-être cette affection explique en partie l'affection que j'ai porté à ce dernier, étant donné que mon cours de neurologie a longuement traité de cette maladie, mais Mike n'est pas seulement infirme, il a un sixième sens, il est médium pourrait-on dire ... ce qui n'a pas manqué de me faire penser à Dany Torrance, de Shining que l'on retrouve Docteur Sleep, sorti après Joyland la même année. Je ne sais pas dans quel ordre il a imaginé les deux romans, mais cette correspondance semble dès lors plus qu'une coïncidence, ce qui m'a dans un premier temps agacé.
La comparaison, cependant, s'arrête là, car le fantôme de Linda Gray et le don de Mike ne sont pas davantage creusés, fort heureusement. Ce zeste de fantastique, typique de l'auteur, est en effet relégué au second plan par le semblant d'enquête que mène Devin. Cette même enquête m'a également semblé occultée par la vie personnelle de ce dernier, ce qui aura eu pour effet de dissiper tout suspense, jusqu'au moment fatidique du moins. De ce fait, le livre porte bien son nom, en raison du fait que c'est le parc (qui porte lui-même bien son nom) et la vie au parc qui occupe principalement le roman. Néanmoins, il n'en reste pas moins que, malgré la qualité des personnages, l'histoire ne m'aura, en fin de compte, pas semblé suffisamment creusée. Finalement, Joyland ne tient pas, à l'instar de sa fameuse quatrième de couverture, ne tient pas toutes ses promesses.