Kinderzimmer, de Valentine Goby (par Clarice Darling)
Voilà un livre ambitieux et qui laisse songeur. Mila vient d’être raflée par la police et déportée au camp de Ravensbrück. Quelques temps après son internement, elle ressent ce qu’elle pense être des signes de maladie. Il s’avère finalement que Mila est enceinte. Comment vivre sa grossesse, comment accoucher quand on est interné? J’ai découvert l’existence des Kinderzimmer grâce à l’ouvrage de Valentine Goby. Pour moi, toute femme, un tant soit peu enceinte, finissait directement assassinée, afin d’éviter aux SS de s’encombrer avec des nourrissons. Mais pas à Ravensbrück.
Dans ce camp quasiment exclusivement féminin, une sommaire salle d’accouchement à été aménagée à partir de 1943, étrange lieu de mort où l’on donne la vie.
Valentine Goby vient de rédiger un ovni littéraire. Le style est froid, percutant, aride, comme un hiver en Allemagne. Beaucoup de phrases sont nominatives, pas de verbe, ce qui rend la lecture particulièrement stressante, oppressante. Pas besoin de s’épancher sur des explications. Tout est dit en quelques mots et le roman entier est une course folle vers l’horreur.
Ce livre m’a laissée dubitative. Je l’ai rapidement lu, et je n’arrive pas à me faire un avis, plusieurs jours après. Je suis incapable de dire si j’ai apprécié ou non ce roman. Qui n’en est pas un, puisque la Kinderzimmer a véritablement existé et que la grande résistante Marie-Jo Chombart de Lauwe, à qui cet ouvrage est dédié, y a oeuvré tant qu’elle a pu pour sauver les vies de ces bébés de la mort. Trois enfants français sont nés et ont survécu à Ravensbrück. Deux garçons et une fille, qui ont maintenant entre 69 et 70 ans. Personne n’est mieux placé qu’eux pour nous donner un résumé de cet ouvrage fort. Car personne d’autre qu’eux ne peut dire ce qu’il s’est réellement passé, dans la Kinderzimmer de Ravensbrück.