La fille de la supérette est un récit court, doux mais précis, qui dépeint avec bienveillance mais sans complaisance l'incapacité de certains à s'adapter à un monde complexe et codifié. Keiko s'est toujours sentie exclue de l'univers, de ses codes, de ses diktats sociaux. Le konbini est son échappatoire, un espace binaire (bien ou mal) ou tout est simple, superficiel, immuable malgré les changements. Shihara se dresse lui contre la société, il rejette agressivement ce qu'on lui demande, mais n'agit pas non plus. Là où Keiko trouve une forme de sagesse et de sérénité, il reste insatisfait.
Sayaka Murata a touché une corde sensible au Japon avec son livre. La rationalité dont fait preuve son personnage principal fait voler en éclat la notion de norme : si elle y trouve son compte et ne dérange personne, son choix doit-il lui être reproché ? S'accomplir en tant que femme, ou qu'être humain ne peut-il être possible qu'en se pliant aux attentes des autres, de la norme culturelle ?