Grisham raconte l’histoire vraie principalement de Ron Williamson, gars lambda qui a été condamné à la peine de mort pour un meurtre qu’il n’avait pas commis. Subissant l’incompétence des différents protagonistes, sa propre situation personnelle trop chaotique pour pouvoir faire face aux accusations et 11 années de réclusion criminelle avant d’être blanchi. Le tout le laissant sacrément atteint mentalement.
J’ai récupéré le livre via ma mère parce que le nom de l’auteur me parlait vaguement et je me disais que ce serait l’occasion de me faire une idée dessus. En survolant le résumé SC j’ai lu « Par passion de la vérité, un des romanciers les plus célèbres de la planète [...] » et j’ai préféré ne pas lire la suite car je déteste les personnages outrageusement pleins de superlatifs, j’avais peur que ça m’enlève toute envie.
Quelle ne fut pas ma surprise en comprenant (bien plus tard) que le personnage du romancier en question n’est pas un personnage mais l’auteur John Grisham dont on parle. Résumé de merde. La flagornerie qui suinte est encore plus irritante.
Tout ça pour dire que je ne m’attendais à rien.
L’écriture m’a donc parue assez froide, pas de réel personnage principal qu’on suit de près, on reste en tant qu’observateur d’un reportage. Les bévues voire gros manquements des enquêteurs étaient tellement ahurissants que c’en était bête. A plusieurs reprises je me suis faite la remarque que Grisham abusait un peu à rendre tout le monde aussi cons-cons : policiers, enquêteurs, experts, procureurs, avocats, etc. Que – même si ça bâti une belle histoire d’erreur judiciaire – il avait tendance à avoir la main lourde en termes de personnel incapable.
Du coup, quand j’ai compris au deux-tiers du livre que c’était inspiré d’une histoire vraie ça m’a franchement abattue bien que tout ait trouvé une logique.
En voyant la couverture du livre et lisant a posteriori le résumé au dos j’ai la sensation que les éditeurs ont essayé de cacher le fait que ce ne soit pas de la fiction en restant flous, sans doute par crainte que moins de gens soient partants pour cette lecture. Je comprends la logique commerciale mais je trouve ça dommage car les deux types ne s’abordent pas de la même manière et il y a forcément une déception. Au moins je comprends mieux le côté « froid » de la narration, c’est justifié mais le mal était un peu fait me concernant.
Pour les thèmes abordés :
- la peine de mort : je reste pour tout en doutant qu’elle puisse un jour être appliquée de la manière dont je le conçois (à moins que ce soit un multi-récidiviste, le crime pour lequel Ron Williamson a été inculpé ne lui aurait pas valu la chaise dans ma conception des choses) même si effectivement je ne pense pas les américains suffisamment aptes à la mettre en œuvre quand on voit que ce genre d’affaire a été rendue possible ;
- la justice des privilégiés : il est effrayant de voir combien on ne sera jamais tous égaux face à la justice. Si t’as pas d’argent t’es cuit. Et encore ! On pourrait ne pas avoir le couteau le plus affûté du tiroir en guise d’avocat on pourrait s’en sortir, c’est l’égo d’un procureur ou d’un enquêteur qui est une vraie condamnation. Et les enjeux politiques qu’il y a derrière une affaire qui resterait non classée quand ça a secoué toute une ville qui poussent à une enquête expéditive pour avoir des coupables, peu importe que ce soit la vérité ou non. Et les experts scientifiques ! Un expert peut en contredire un autre donc une affaire ne doit pas reposer que sur ça. On doit s’intéresser aux procédés, à ce que signifie sa démonstration sans l’interpréter à elle seule. J’avoue que cette histoire d’identification de poils était tellement tirée par les cheveux (lol) que c’est une des principales choses qui m’ont fait dire que l’auteur abusait sur ce que je pensais être de la fiction ;
- la vie foutue en l’air des drogués/alcooliques : on voit avec les deux condamnés, Dennis Fritz et Ron Williamson, que l’un s’en est mieux sorti que l’autre à la sortie de la prison 11 ans après leurs condamnations. La déchéance de Ron m’a vraiment touchée autant qu’énervée. Un peu froidement je vais dire qu’avec ou sans l’erreur judiciaire il s’annonçait comme un déchet de la société. Alcoolique fini, il enchaînait la sobriété avec la rechute en boucle, et en plus le poids de l’injustice subie a achevé de lui niquer le cerveau. J’imagine la frustration de sa famille et plus largement son entourage qui ont essayé de lui venir en aide et qui l’ont vu replonger dans ses démons constamment. J’ose même dire qu’ils auraient moins essayé d’être là pour lui s’il n’avait pas vécu une telle injustice (ça n’engage que moi et je ne les en blâmerais pas). Ma partie sensible était bouleversée de voir qu’il n’a pas eu une vie qui l’aurait amené vers de meilleurs choix. En imaginant avoir un frère comme ça j’étais soulagée pour eux qu’il finisse par s’éteindre 5 ans après sa libération (paix à son âme), je pense qu’on ne pouvait rien pour lui. Réalité ou fiction, s’il a vraiment dit qu’il aurait préféré ne pas naître, je le comprendrais. Je pense que dans ses moments de lucidité il devait être le premier frustré de ne pas réussir à avoir le dessus sur lui-même et de constater l’engrenage qu’il a suivi et toutes les tentatives manquées de bifurquer sur une autre voie. Il y a un stade auquel tu es trop abîmé pour être récupérable et autre chose qu’un poids pour tout le monde. Rien qu’à penser à tous ces gens dans ce même cas (dans notre société d’alcooliques et de drogués) ça me fait vraiment de la peine pour eux et m’énerve qu’ils n’aient pas eu envie d’agir différemment dans des moments cruciaux de leur vie.
Bref, l’histoire vraie est horrible. Ma note moyenne pâtit de cette première impression qui s’attendait à de la fiction. Ca tirait par moments en longueur.