A chaque fois que je parle d'Emmanuel Carrère, on me pose invariablement la même question : "t'as lu L'Adversaire ?", agrémentée d'un "il est génial ce bouquin !". Et je répondais de plus en plus gêné que non, je ne l'avais pas lu, car j'avais découvert Carrère avec Un roman russe, et que je n'avais pas encore eu le temps de me pencher sur ses publications antérieures.
Après l'avoir dévoré, je confirme que L'Adversaire est un très bon livre, ce qui devient presque une marque de fabrique de l'auteur, pour ce que j'en sais.
Carrère est un conteur. Il raconte les histoires comme personne ; quand il ne se raconte pas, il raconte les autres, et il le fait avec un style et une empathie qui sont absolument bluffants, au point qu'on a toujours l'impression qu'il réussit à revivre les évènements du récit comme s'il en avait été le principal protagoniste.
Dans L'Adversaire, il raconte la folle histoire de Jean-Claude Romand, cet homme qui a assassiné sa femme, ses deux enfants, ainsi que ses parents, car la vie qu'il avait menée jusqu'à maintenant, fondée sur le mensonge qu'il était un médecin réputé, chercheur à l'OMS, était sur le point de s'effondrer.
Avec ses interrogations habituelles d'auteur, ses doutes, ses incertitudes, il raconte de la manière la plus simple ce qui, on le découvre au fil des pages, ne se raconte pourtant pas facilement.
Emmanuel Carrère est un magicien des histoires, je le pense à chaque fois que je découvre un livre de lui, il sait raconter les gens comme personne, et je crois que si je devais un jour prendre la plume, j'aurai l'espoir fou d'être au moins aussi doué que lui.