Un véritable coup de cœur pour ce livre si particulier. Il faut dire que son auteur est russe et qu’il écrit directement en français et cela fait toute la différence. Un style inclassable, des tournures de phrases bien à lui et constamment des répétitions de mots comme pour mieux les ancrer mais aussi nous offrir une mélodie. Des phrases inhabituelles et déroutantes au commencement, bien vite on tombe dans le chaudron russe et ce qui était étrange devient enchanteur. Une ponctuation anarchique qui donne un peu plus un rythme qui lui est propre. Tout du long, j’ai eu le sentiment d’écouter un conteur habile en introspection qui par le biais de son personnage principal nous offre une histoire digne des tragédies grecques. Nous allons suivre Maria patte d’ours, née sur les bords de la Mer Blanche dans le Nord de la Russie. Maria n’aurait pas du survivre avec son handicap tant la vie est dure entre famine, misère et révolution. Pourtant c’est bien elle qui lutte avec acharnement pour sa vie mais aussi pour la vie des orphelins dont elle a la charge. Nous suivons son parcours quasi initiatique depuis sa naissance sur la corde raide entre vie et mort omniprésente. Quelle valeur a la vie dans ces contrées, à cette époque, où pour un morceau de sucre ou quelques poissons, elle peut être échangée. Heureusement, grâce à sa marraine, un personnage qui oscille entre la chamane et la religieuse, elle apprend à survivre dans les pires conditions. Lorsque la petite histoire rejoint la grande et que l’auteur situ son action lors du siège de la ville de Leningrad en 1944, alors on sait que l’on s’enfonce dans la douleur, l’obscurité et la violence. Tout se ligue contre la vie, le terrible froid, la guerre, la famine, la maladie et même un ours lui aussi rendu fou par la faim. Un récit puissant et intimiste qui force le respect. Bonne lecture.
http://latelierdelitote.canalblog.com/archives/2021/08/25/39107178.html