Première fois que je posais mes yeux sur du Duras et ce fut une agréable découverte.
Et je pense que cela vient grandement des "personnages" qui composent sa famille. Que ce soit la mère, qui semble tirée d'une tragédie antique, tiraillée par sa condition et son amour maternel, que ce soit Pierre, cette créature perverse, ou bien Thanh, l'ange gardien de l'héroïne, leurs relations plus ou moins conflictuelles arrivent à nous mouvoir, à nous faire aimer et à nous faire penser sur l'amour, la peine, la famille. De plus, cette famille incarne ce que je pense être le cœur de ce roman : l'amour dans ses bas-fonds.
En effet, de l'amour d'une mère pour son fils dangereux à l'amour d'une fillette pour un adulte, ce roman démystifie toutes conceptions romantiques et laudatives de l'amour. Et l'écriture sèche et rythmée de Duras ne nous permet pas de nous reposer sur ce qui était son opinion. La lecture de ce roman, c'est un peu la descente d'une rapide, l'amour de ses beaux atours nous entraîne, nous émeut, mais les roches ne sont pas loin et on se ressaisit de justesse devant ses excroissances de l'amour,qui interrogé sa morale.
Pour ce qui est des points négatifs, j'en évoquerais deux. La relation entre Marguerite et l'amant, qui était pleine de vitalité à ses débuts, mais qui est devenue factice au milieu du roman. Les deux avaient pris conscience de la fin de leur idylle, mais à la place d'un tourbillon complexe de sentiments (folie amoureuse, désintérêt, désir morne), j'avais l'impression d'une fin de contrat amoureux : on s'excuse, on se serre la main et on part. L'autre point serait sur l'absence de thèmes abordées. Cette histoire aurait pu se passer à Paris comme à Antafagosta, je n'ai pas ressenti l'Indochine, le statut de colon de la famille de Marguerite. Mais le thème réellement absent est celui de la classe sociale : l'amant est un riche chinois héritier, ayant fait ses études à Paris, lorsque Marguerite est maligne mais fille d'une directrice d'école endettée. On a toute cette histoire de dédommagement à la fin, mais dans la relation du couple en elle-même ce rapport de classe est bien absent.
Néanmoins, mention spéciale aux petites notes pour un possible réalisateur de l'apart de Duras, qui furent agréables.