Ce sont encore les débuts de Jane de La Vaudère dans sa carrière d’écrivaine : avec L’Anarchiste, un recueil de six nouvelles, elle montre sa maîtrise de la narration (surtout de la structure) et signe un recueil finalement assez peu inégal – contrairement aux recueils de nouvelles en général. Esotérisme et macabre d'une créativité morbide, ce recueil, particulièrement marqué par la mort et la réincarnation, est une bonne surprise !
L'Anarchiste : ⭐⭐⭐,5
Une nouvelle plus longue, avec un intertexte politique intéressant et une vision de la femme assez typique dans sa réhabilitation (si on lui donne les moyens de réfléchir elle peut se montrer digne et comprendre le mal). Cette nouvelle reste très décadente : effectivement, elle n’est pas épargnée par la hantise de la décadence, ici moins macabre (quoique…), plus de considérations sociales et politiques. On voit aussi que la modération est une qualité féminine très encensée à l’époque (serait-ce toujours le cas d’ailleurs…?), bien que Jane de La Vaudère soit plus nuancée, malgré quelques simplifications.
Nihiliste : ⭐⭐⭐,5
La fin et le twist sont réellement surprenants et plutôt bons. La nouvelle a cependant peu à voir avec le reste, ce qui est dommage : ici pas de réincarnation, ni de création, bien qu'il y demeure des accents morbides intéressants.
Le centenaire d'Emmanuel : ⭐⭐⭐,75
Très bonne idée, mais je l'aurai voulue plus longue. C’est l’histoire d’un écrivain illustre réincarné dans un vagabond : il a l'occasion de voir comment il est célébré (on dirait Victor Hugo) et comment il est méprisé en tant que vagabond. Bon, ce n’était pas renversant non plus du point de vue de la narration.
Une vengeance : ⭐⭐⭐⭐
Ambiance gothique à la Shelley qui semble être au premier abord du fantastique glauque et bizarre à la Mérimée, la nouvelle se place entre la littérature frénétique, en complexifiant les caractéristiques, et le macabre décadent dans ses thèmes et résonnances fin-de-siècle. Dedans, La Vaudère déjoue les attentes des représentations de la femme.
Réincarnation : ⭐⭐⭐,75
Occultisme et orientalisme dans un programme macabre comme toujours ! Pas grandiose mais une fin satisfaisante !
L'étoile double : ⭐⭐⭐⭐,5
Hyper géniale. On voit dans cette nouvelle une humanité problématique, presque misanthrope, mais somme toute très fragile et surtout ambivalente en ce qui subsiste en sa nature quelque chose de charnel, de sensuel qui provoquent une réelle pulsion de vie et de foi qui convergent vers le désir et la nécessité de chaque être : l'amour. Nouvelle philosophique, nouvelle fantastique, fantasmagorique même, elle déploie un univers génial, et si créatif. Très riche.