« J’ai grandi dans la littérature, il me manquait quelque chose. Il me manquait les animaux. »
Rendre une place aux animaux dans la littérature : ce pourrait être un des fils directeurs de l’œuvre de Chevillard, qui au fil des livres a rendu hommage avec panache à l’orang-outan, au fourmilier et à la tortue, pour n’en citer que quelques uns. Lui faire passer une nuit dans la Grande Galerie de l’Evolution et plus particulièrement dans la galerie des animaux disparus, dans le cadre de la collection Ma nuit au musée, relevait donc de l’évidence et constituait une belle promesse.
Malheureusement, à quelques jolies pages près sur certains des thèmes fétiches de Chevillard - un certain rapport émerveillé au monde animal en même temps qu’une sincère inquiétude pour son avenir, et un regard désabusé sur la futilité des entreprises humaines - l’Arche Titanic sent trop la commande, le texte rendu parce qu’il fallait bien, au bout d’un moment, l’aboutir, fut-ce sans conviction : un assemblage de pensées souvent contradictoires nées sur place et d’un récit en pointillés qui tente de donner une teinte plus personnelle à l’ensemble mais qui se révèle parfaitement inepte, Chevillard se dérobant - c’est son habitude - face à tout risque de dévoiler quoi que ce soit de réellement intime. Certes, cette forme plutôt disjointe, à sauts et à gambades, est une des marques de fabrique de Chevillard, mais on est bien loin ici des brillants exercices de style bourrés de malice que pouvaient être L’auteur et moi ou Le désordre Azerty. Tout ça ressemble plutôt à un mauvais jour de l’Autofictif, le blog quotidien de Chevillard et, dans la continuité des faiblards L’explosion de la tortue et Monotobio, continue de m’éloigner de cet auteur que j’ai tant aimé.