Kabyles et harkis
Trois générations, trois personnages principaux : Ali, Hamid et Naïma. C'est à travers eux, et ceux, nombreux, qui les côtoient, que Alice Zeniter raconte dans L'art de perdre l'histoire d'une...
le 23 août 2017
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Trois générations, trois personnages principaux : Ali, Hamid et Naïma. C'est à travers eux, et ceux, nombreux, qui les côtoient, que Alice Zeniter raconte dans L'art de perdre l'histoire d'une famille kabyle, de l'Algérie à la France, de 1930 à aujourd'hui. Un récit fracassé contre les parois de la grande Histoire, à commencer par la guerre pour l'indépendance. Du souffle, la romancière n'en manque pas dans cette fresque qui confronte ses protagonistes à des choix déchirants, à des décisions fondées sur l'intuition et la raison mais non exemptes de doutes, loin de là, de ceux auxquels on pense, toute une vie durant, non sans se demander si la vie aurait été meilleure en optant pour une autre voie. L'auteure déploie sa tapisserie narrative avec un sens de l'intime d'une incroyable finesse. Ses héros sont ce qu'ils sont, ils ont même un nom dont on les a affublés pour aller vite : des harkis, incompris et souvent détestés dans leur Algérie de naissance, mal considérés dans leur nouvelle patrie. Jusqu'à Naïma, symbole d'une nouvelle génération, parisienne et cultivée, et qui se heurte au silence familial, dès lors qu'elle essaie de remonter à ses racines. L'art de perdre est un livre généreux, inquiet et troublant, d'une grande profondeur psychologique, jamais didactique ni surtout donneur de leçons. Si son épaisseur pourrait évoquer un roman fleuve, ce sont plutôt trois rivières et leurs affluents qui composent cette saga à hauteur humaine. Avec des passages poignants, tendres ou drôles (parfois les trois à la fois), comme ceux du camp de Rivesaltes (terrible) ou de la première nuit de Naïma dans le village d'où vient son grand-père (magnifique). Ce livre est autobiographique pour une part qu'il est difficile de connaître et cela ne regarde qu'Alice Zeniter, après tout. Une chose est certaine, en tous cas : elle peut être fière de ce roman dense et remarquablement fluide. L'art de perdre mérite le plus grand succès et une place privilégiée dans les prix littéraires de l'automne.
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le 23 août 2017
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