L'absence de toute référence temporelle absolue laissait déjà présumer le manque de rigueur de son auteur, quoiqu'il se dégageât de l'œuvre une volonté manifeste d'objectiver l'histoire de l'Empire perse, à travers les nombreux témoignages qu'il dut recueillir et confronter pour parvenir à réaliser un tel ouvrage. Histoire, géographie, anthropologie, il est impensable de soupçonner à Hérodote son érudition après la lecture de la mine d'informations qu'il a pu constituer et qui s'étendent à l'intégralité du monde tel qu'il était conçu sous l'Antiquité. En revanche, il est nécessaire de pointer la naïveté, sinon la dévotion du polymathe, ne sachant guère distinguer les faits des légendes qu'il a rapportés ainsi que la fiabilité de ses témoins. S'il n'est pas malavisé de conter les histoires fabuleuses qui se transmettaient oralement, c'est une erreur que de les faire figurer dans une œuvre historique en ce que cette narration participe à décrédibiliser l'auteur, du moins à jeter la doute sur la pertinence de ses sources et de ses propos. D'autre part, il semble assez fantaisiste d'attribuer aux oracles la cause d'une multitude d'évènements, sans remettre en question le mysticisme des Anciens (dont Hérodote fit partie), cela parait surtout être une conséquence de l'humaine peur du vide.
L'Histoire d'Hérodote est très mal organisée, les innombrables digressions (surtout culturelles) viennent saturer la lecture d'une œuvre pourtant exprimée avec beaucoup de clarté. Le propos n'est contaminé d'aucune emphase, c'est - comme dit au début de la critique - l'absence de datations qui empêche d'abord de suivre le récit attentivement, d'autant plus que le découpage de l'ouvrage n'est pas strictement chronologique, en témoigne le livre II qui livre une histoire de l'Égypte au demeurant abracadabrantesque. Les dialogues donnent un attrait majeur aux enquêtes d'Hérodote, ils fournissent le rythme de l'œuvre, et même si l'on ne saurait douter de leur caractère inventé, à l'instar des vaticinations, ils offrent un champ encore plus large d'expression à l'auteur comme le célèbre dialogue des sept Perses sur la meilleure forme de gouvernement au livre III. Le flot d'informations discontinu submerge le lecteur et noie le propos de l'auteur, cette incapacité à sélectionner les éléments utiles à la compréhension du sujet majeur de l'ouvrage dessert complètement le labeur de l'historien, quoiqu'on sache que son histoire était destinée à être écoutée (ainsi que l'indique la page Wikipédia de l'ouvrage).
Pour faire court quant à l'intérêt du livre, sans une lecture suivie, c'est-à-dire sans prise de notes, lire cette œuvre représente une pure perte de temps, les détails qu'Hérodote a fournis sont trop conséquents pour permettre au cerveau de mémoriser plus que les grands noms qui reviennent des dizaines de fois (Crésus, Cyrus, Cambyse, Darius, Xerxès, Mardonius), l'essentiel des guerres médiques et quelques vaines anecdotes. La prise de notes s'inscrit dans une entreprise de compréhension profonde de l'Antiquité en disposant de toutes les informations prêtes à être confrontées à la perception contemporaine de la réalité de l'empire Perse.