L'Éthique
8.1
L'Éthique

livre de Baruch Spinoza (1677)

Sacré morceau que l'Ethique de Spinoza.


Ce que j'aime beaucoup dans cette œuvre c'est la célérité : une fois que vous attaquez la première page il ne faut pas lâcher le bouquin avant la fin afin que votre esprit reste en mouvement et en accord avec les nombreuses définitions, axiomes, scolies et démonstrations qui jalonnent l'ouvrage. Et puis, c'est quand même sacrément emmerdant d'avoir à revenir sur chaque page pour retenir les définitions. C'est une lecture pas une correction de DS de maths.


En tout cas, Spinoza est ancré dans son époque, partagé entre le manichéisme religieux encore très dominant et l'essor de la science qui bouleverse les mœurs, deux notions qu'il cherche à... concilier ? dépasser ? C'est vraiment un objet historique car on sent la filiation avec la raison de Descartes et plus tard Rousseau sur les notions complexes du libre arbitre ou du droit naturel.


J'ai énormément apprécié la conclusion de l'œuvre qui rejoint Saint-Augustin avec sa quête de vérité dans Dieu à ceci près que Spinoza rompt totalement avec la vision monothéiste : Dieu ne s'incarne pas en un être fini mais il est lui même une substance infinie et immanente et c'est pourquoi la recherche de la connaissance de cet infini nous élève. Ca manque de grâce mais ça a le mérite de proposer autre chose que le finalisme pour comprendre le monde.


C'est à dire que Spinoza nous explique que la substance de Dieu étant infinie et immanente, elle s'incarne dans la nature. Cette nature où réside une infinité d'attributs, essence de toute chose, bonne ou mauvaise. Et que toute chose ne peut être perçue distinctement que par la raison en opposition aux sentiments qui peuvent nous faire confondre la cause et l'effet et nous éloignent alors de la vérité.


Je crois d'ailleurs que le moment le plus jouissif est celui où Spinoza ambitionne de définir les sentiments et leurs origines : il a une véritable intuition sur la joie, le désir ou encore la tristesse qui lui permette de décliner de façon logique une palette de sentiments comme l'amour, la haine ou encore l'orgueil.


J'y ai trouvé alors un véritable intérêt pratique à essayer de décortiquer ces foutus sentiments universels qui peuvent biaiser notre jugement au quotidien et je crois que c'est cela la force de l'ouvrage : aspirer à la liberté par la raison et l'acceptation des affects du corps et de l'esprit en dehors de tout carcan moral.

Super_Coucougnou
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le 25 oct. 2021

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