Jésus sur la voie de l'ésotérisme

Cette liste de 114 « logia » (paroles, citations) de Jésus présente une certaine variété. Certains d’entre eux sont presque parfaitement décalqués sur des citations contenues dans les Evangiles canoniques, dont les références sont aisément identifiables. Un assez grand nombre d’autres ressemblent à des citations canoniques, mais en divergent par tel ou tel aspect, et c’est dans ces divergences que l’enquêteur érudit, voire soupçonneux peut déceler une influence des idées gnostiques.

D’autres logia, enfin, sont originaux, ce qui ne signifie pas qu’ils sont très clairs. En effet, un caractère assez frappant de ces citations, c’est, pour bon nombre d’entre elles, leur obscurité leur caractère paradoxal, leur art de dire les choses à demi-mot, d’y suggérer un ou plusieurs sens cachés, applicables à plusieurs situations fort différentes.

Ce qui peut frapper le lecteur lorsqu’il lit intégralement les Evangiles canoniques est encore plus manifeste dans cet écrit : les paroles de Jésus ne sont pas faciles à comprendre. Le pouvoir ecclésiastiques, afin de répandre la religion chrétienne, a été amenée à simplifier à outrance le message de Jésus afin d’en donner une version simple à comprendre.

Mais voilà : ces logia, tant canoniques que gnostiques, ne sont pas aisés à saisir ; cette obscurité même rattache aisément Jésus à l’hermétisme et au langage de l’ésotérisme, et l’apparent aux formulations énigmatiques proférées par Bouddha, Lao Ze ou les Upanishads.

Où donc se trouve le gnosticisme là-dedans ? Dans la vertu sotériologique de ces logia : comprendre le vrai sens des paroles de Jésus permet d’accéder à la lumière et échapper à la mort. Ces citations incitent le fidèle à chercher le sens, à pratiquer le travail, à subir la peine, à consentir à l’abandon, à se détourner du mariage.
Bref, c’est une morale propre à orienter vers l’état monastique.

Si fin du monde il y a, sa définition est détournée dans un sens gnostique : la fin de l’histoire, c’est le moment d’accès à la connaissance, qui est aussi la sortie du Monde. Celui qui sera sauvé est celui qui aura trouvé l’interprétation des paroles énigmatiques de Jésus.

Thomas ne joue pas un grand rôle là-dedans ; il est censé être le scripteur de la collection, c’est tout. Inutile de chercher dans ce texte quelque renseignement biographique sur Jésus. Cette collection de citations se borne à réinterpréter certains logia dans un sens gnostique, privilégiant l’effort et l’ascèse intellectuelle, quitte à obscurcir encore davantage certains enseignements de Jésus, qui ne sont déjà pas tous clairs dans les Evangiles canoniques.