Présenté comme le romancier le plus brillant de la nouvelle génération néerlandaise, Joost de Vries démontre que ce statut n'est pas usurpé, tout du moins dans la première partie de L'héritier, son premier livre traduit en français. Son narrateur, Friso de Vos, est responsable d'une revue très intellectuelle et l'ami de Josip Brit, une sommité dans son domaine : le métadiscours sur Hitler. A la mort brutale de son mentor(Brit, pas Hitler), de Vos se fait voler la vedette en tant qu'héritier spirituel du maître par un inconnu qu'il n'aura de cesse de vouloir discréditer. Autant la première moitié du livre est ébouriffante, gorgée d'un humour parfois "limite", autant la deuxième se perd dans un dédale de péripéties sans grand intérêt dominé par la confusion. La satire universitaire, qui rappelle de loin les écrits de David Lodge, est pourtant savoureuse et la documentation autour du Führer fort impressionnante. Dommage que cette quête identitaire : comment exister dans l'ombre d'un grand homme et surtout comment survivre après sa disparition, est noyée dans un récit qui mêle vie intime et image publique, auprès de "happy few", intellectuels et chercheurs et même espions non identifiés. Le rendez-vous avec Joost de Vries est à moitié manqué mais lui donner une nouvelle chance avec une éventuelle future parution est plus qu'envisageable.