Banquet littéraire

C'est le premier livre de l'auteur que je lis. Et je suis servi !

De renom il n'y a pas de doute, Hugo devait faire partie de mes lectures. Depuis longtemps. Je sais aujourd'hui pourquoi je reviendrai vers ses livres. C'est immense.

La qualité littéraire ? Sans aucun doute l'un des meilleurs auteurs que j'ai lu. Le style est flamboyant, voire érudit par moments. Il paraît que ce livre est un peu à part de ce point de vue-là, au-dessus des autres. Mais quelle richesse !! Quelle festin ! Lire Victor Hugo, c'est comme manger un bon steak bien gras en sauce, et puis s'en reprendre encore un peu tellement c'est bon. Il y a de la matière, il y a du volume et il y a du goût.

Les personnages ? Alors là il faut aller chercher loin pour trouver quoi que ce soit à redire de leur qualité. Profonds, épais, torturés, dotés d'esprit, réalistes, froids, humains, innocents, dignes. Allez-y, là aussi la matière est généreuse. Je noterai toutefois que les femmes n'ont pas une place reluisante dans cette histoire... L'image de la femme serait-elle plutôt négative chez Hugo ? A vérifier dans les autres ouvrages.

L'histoire ? C'est très simple. La défense est du côté des pauvres, des bas-fonds, de ceux qui galèrent depuis le début de leur vie. L'on suit Gwynplaine, l'Homme qui Rit, et son histoire depuis ses dix ans jusqu'à la fin de sa vie. Il a la chance de sortir d'une situation périlleuse dès le début. Il se tire même de la mort tout en sauvant un nourrisson. Et il trouve un coin de paradis chez un certain Ursus avec qui il grandira et forgera son esprit, tourné vers la liberté. Il aimera Dea, de tout son coeur. Et l'on assistera à l'ascension sociale de Gwynplaine devenant... Là je m'arrête, vous pouvez lire le chef d’œuvre, c'est bien mieux.

La pensée de Victor Hugo habite ce volume. Il se livre par moment à des envolées révoltées, et il assène de véritables attaques à l'aristocratie :

"L'aristocratie, ce vautour, a couvé cet œuf d'aigle, la liberté.
Aujourd'hui l’œuf est cassé, l'aigle plane, le vautour meurt."

Rien à ajouter. Ou sinon, qu'il ne s'y attaque pas avec une force éperdue. Non, il s'enivre lui-même de ses idées, nous les livre avec puissance, un verbe reluisant. Et l'on en sort grandit ou bien sous le choc.

Certes, il y a quelques longueurs ; ces passages où il nous montre son érudition sur le fonctionnement des Barons, des Ducs, des Lords, des Pairs d'Angleterre et de France... Il nous passionne avec son vocabulaire immense, tant dans la marine que dans toutes ces choses futiles qui peuplaient les gens du XVIIe siècle. C'est l'époque de notre histoire avec Gwynplaine.
Mais je n'ai jamais eu envie de fermer le livre. Non, c'est plus que nourrissant, c'est... Je n'ai pas de mot, sinon "Hugoïen" ?!

Oui, cette brique de presque 800 pages est un chef d’œuvre de la classe littéraire du XIXe siècle. Cet auteur, que j'ai mis tant de temps à venir lire m'a étourdi et vivifié en même temps (chose peu banale).
Cet Homme qui Rit est une tragédie. Mais c'est une tragédie qui vous est amenée avec une telle beauté qu'elle est magique. Certes il faut avoir faim pour venir se rassasier du maître des mots.

Mais, oui c'est beau, c'est grand, c'est majestueux, c'est flamboyant, c'est... un banquet littéraire.