"Sciences et Avenir" de Janvier 2023 l’avait recommandé : « Nous connaissons les précédents ouvrages de Stefano Mancuso, et l’amour indéracinable qu’il voue aux plantes […] Ici, il creuse le sillon avec humour et liberté, en laissant la démonstration des avancées des connaissances émerger par le concours de l’histoire et de l’aventure… » Alors, installez-vous confortablement dans votre fauteuil préféré, à portée de main, votre boisson favorite, et laissez-vous emporter par la narration savoureuse et souvent étonnante de notre ami Stefano qui nous invite à partager un incroyable voyage…

Stefano Mancuso est un biologiste italien né en 1965 à Catanzaro. En 2001, il devient professeur à l'université de Florence. En 2005, il y crée le laboratoire international de neurobiologie végétale, destiné à l'étude du comportement des plantes. En 2012, dans le projet Plantoïd, il participe à la création d’un robot bioinspiré, qui pourrait par exemple explorer un sol peu accessible ou contaminé par un accident nucléaire ou une attaque bactériologique. Il publie L'Intelligence des plantes, coécrit avec Allessandra Viola (version française en 2018)

https://old.senscritique.com/livre/L_intelligence_des_plantes/critique/198781164

Puis La Révolution des plantes en 2019 et Nous les plantes en 2021.

Parce qu’on les a en permanence sous les yeux, les plantes font partie du paysage et on ne les voit plus, enracinées on les croit immobiles mais elles – ou leurs descendances – ont une grande capacité de mouvement, sur un temps long (pour nous), en utilisant toutes sortes de moyens disponibles.

Un exemple ?

L’île de Surtsey : à la mi-novembre 1963, une éruption volcanique sous-marine faisait surgir une île à une trentaine de kilomètres des côtes islandaises. Le 5 juin 1967, l'île a atteint sa superficie maximale de 2,65 km2 et sa hauteur maximale avec 173 mètres d'altitude. Le 1er décembre 1963, seulement deux semaines après le début de l'éruption, les premiers êtres vivants recensés sur Surtsey sont des goélands repérés sur l'île. En 1965, la première plante vasculaire, une Cakile arctica, poussait sur une plage de sable de l’île.

« De toutes les espèces vasculaires répertoriées sur l’île, 9 % ont été transportées par le vent, 27 % par la mer et les 64 % restants par les oiseaux. » En 2008, quarante-cinq ans après sa naissance, on recensait à Surtsey 69 espèces de plantes, dont 30 étaient désormais considérées comme sédentaires.

Revenons sur la terre ferme pour une ou deux histoires parmi d’autres…

Vous connaissez la Senecio squalidus ? C’est une plante d’une cinquantaine de centimètres avec de belles fleurs jaunes réunies en corymbes qui pousse librement sur les flancs de l’Etna. Probablement que dans le cadre d’échanges entre jardins étrangers quelques graines Siciliennes ont été fournies au jardin botanique d’Oxford. En 1794 elle a déjà colonisé tous les murs du Collège. En 1844 le chemin de fer relie Oxford et Londres, une aubaine pour notre Sicilienne qui suit les rails (le gravier lui rappelle sa terre natale) et se retrouve au centre de l’Écosse à la fin du XIXe siècle… Parions qu’entre-temps elle aura pris un fort accent British.

Comme ces graines de dattes récoltées durant les fouilles archéologiques, à Massada en Israël, et vieilles d’environ deux mille ans (entre 155 avant J.-C. et 64 après J.-C.). Trois graines furent plantées, huit semaines plus tard, l’une avait germé. Un résultat époustouflant. Si tout se passe bien, un authentique palmier-dattier remontant à l’âge d’or de cette production pourrait recommencer à produire après deux mille ans !

Juste un mot sur les arbres solitaires. Ces arbres tellement isolés qu’ils font dire à l’auteur : « Si l’on y réfléchit bien, un arbre solitaire ne devrait en effet pas exister. C’est un contresens. Chaque être vivant solitaire est en quelque sorte une contradiction. »

Citons le courageux acacia du Ténéré qui survécu vénérablement au milieu de rien, ou plutôt du désert, par 50°C, sans aucune végétation à des centaines de kilomètres à la ronde, bénéficiant du respect des Touaregs le considérant comme un phare au milieu du désert et qui meurt en 1973 d’un… accident de la route ! Renversé par un camion… l’histoire ne dit pas si le conducteur était sous l’emprise de la cocaïne !

Le règne animal et le règne végétal, deux mondes distincts ? Allons donc ! On l’a dit, pour voyager les plantes utilisent et comptent souvent sur les animaux qui sont heureux de trouver de gros fruits, avec beaucoup de pulpe, colorés, parfumés et appétissants. Mais investir beaucoup d’énergie dans une coque, dont l’unique objectif serait de contenir la graine, pourrait sembler parfaitement inapproprié, si ces gros fruits n’avaient en réalité d’autres tâches à remplir. Ils doivent servir d’appât, et en même temps de récompense, pour tous les animaux qui, s’en nourrissant, rempliront la fonction essentielle de transporter les graines loin de la plante mère.

Vous, je ne sais pas, mais moi, la première fois que j’ai coupé un avocat en deux, j’ai été surpris par la taille de la "graine" à l’intérieur ! Et bien, les avocats sont originaires d’Amérique et remontent à une époque où, il y a 13 000 ans, il y avait profusion d’herbivores géants qui en étaient friands, comme les paresseux géants ou le Megatherium, et dont la taille de la graine ne gênait pas. Mais la disparition de ces mastodontes aurait pu entrainer celle des avocatiers qui furent sauvés in extremis par le diffuseur parfait : l’homme.

S’associer avec l’homme veut dire signer un pacte avec le diable. Tôt ou tard il te demande de le payer de ton âme. Ainsi, comme cela s’est déjà produit par le passé pour d’autres espèces imprudemment associées à l’homme comme les bananes, le raisin, les tomates, les agrumes, etc. En 2017, une chaîne de supermarchés britannique a commencé à distribuer des packs de cinq avocats sans noyau appelés cocktail avocados, qui présentent le bénéfice supplémentaire de pouvoir être mangés avec l’écorce…

« Pour l’avocat aussi le moment est venu de devenir sans graine (sans noyau) pour satisfaire un marché corrompu. Une fois privée des possibilités de produire des graines, une plante n’est plus un être vivant, mais un simple moyen de production aux mains de l’industrie alimentaire qui décide comment, quand et où la reproduire. Cela ne suffit pas. Une plante sans graine ne peut pas se diffuser à travers la reproduction sexuelle, mais de manière seulement végétative, en produisant des plantes filles qui sont des clones génétiquement identiques à la plante mère. La diversité génétique des espèces disparaît, et seuls quelques individus se propagent en des millions d’exemplaires. Un parasite ou une maladie qui frappe l’un de ces individus est en mesure de frapper chacun de ses clones. »

Pour le plus grand bonheur des apprentis sorciers...

Philou33
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le 27 févr. 2023

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Philou33

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