Orange mécanique le film est daté et même aujourd'hui un peu nanar je trouve (la pornographie pop, les accoutrements swinging London, Les intèrieurs criards). Préservé de tout visuel vieillissant, de toute concession commerciale (Kubrick s'était beaucoup auto censuré) le livre, lui, est en pleine forme !
Il relate à une première personne à la fois naïve et grinçante l'odyssée d'Alex, pur produit d'une société gangrénée par la violence. Et ce n'est pas le moindre mérite du livre que de nous rendre sympathique cet archétype du Mal... Mais le tour de force, c'est sans doute l'argot Russo-anglais dans lequel le livre est écrit. Plus d'un s'arrête au bout de cinq pages. pourtant il suffit de lire une ou deux fois le glossaire en annexe et la lecture s'opère sans qu'on ait souvent besoin de s'y référer, tellement l'auteur a mis de talent pour que l'écriture, d'un style par ailleurs très simple, permette de deviner le sens des mots.
Sur le fond, que rajouter à ce thème profondément philosophique du bien et du mal qui porte tout le livre ? Avec cette conclusion qu'il n'est rien de plus immoral que priver un individu de sa faculté de choix entre les deux pôles, même au prix d'une société violente incurable. L'auteur finit son livre sur cette amertume, à peine corrigée par le dernier chapitre où Alex opte finalement pour le bon côté-ce qui ne manquera pas de hérisser ceux qui ont aimé la fin pessimiste et méchante du film, moi y compris. Indispensable ce bouquin.