C’est dans un pays ensoleillé qu’Amed et Aziz, deux frères qui se ressemblent tellement qu’on les confond puisqu’ils sont jumeaux, vivent dans une orangeraie, entourée d’une montagne sur laquelle ils partent parfois jouer au cerf-volant.
Bien que jumeaux, l’un des deux frères est gravement malade, et quelques jours après être revenu de l’hôpital, la maison de leurs grands parents est bombardée par les Autres, ceux qui sont du mauvais coté de la montagne. À peine le deuil de la famille entamé, une jeep s’arrête sur la plantation et vient parler aux parents d’Amed et Aziz. On parle beaucoup de vengeance, de justice, de poésie, de gloire, et c’est ainsi qu’une ceinture est laissée dans leur maison, objet du cri de déchirement de la mère des deux enfants.
C’est l’histoire d’un sacrifice, d’un choix à faire, d’une fraterie fusionnelle, d’une famille bercée par l’illusion et la fascination d’un paradis éternel. C’est aussi quelques années plus tard, l’occasion pour l’auteur de ce récit de se projeter en tant que metteur en scène souhaitant dénoncer les atrocités d’une guerre.
Je flippe toujours un peu quand des auteurs s’approprient une culture, l’histoire, la perception d’un peuple avec un regard occidental, privilégié, avec toujours ce syndrome du sauveur blanc qui souhaite dénoncer ce qui le sensibilise, ce qui le frappe. Non pas parce que je trouve ça complètement crétin, mais parce ce faisant il s’octroie une place dans un espace où des gens qui vivent vraiment ce qui est écrit pourraient raconter.
J’ai découvert Larry Tremblay dans un fabuleux texte publié à La Peuplade en 2021, Tableau final de l’amour. C’est un texte violent, dur, poétique, et je dois dire que l’Orangeraie m’a bluffé. Il n’y aucun jugement, aucune maladresse liée à ce qui me dérange en général dans des oeuvres de ce genre. C’est intelligent, fin. C’est cruel et je pense qu’il faut avoir le coeur sacrément accroché par moments, même quand on n’a pas d’enfants.
L’Orangeraie est à lire, à relire, à distribuer, pour faire la nique aux grandes gueules qui s’octroient une lutte anti terroriste basée sur une montagne de merdes racistes et néocolonialistes, un patate dans la gueule bien placée, tout littéraire soit-elle, et qui fait un bien fou de nous faire autant de mal.
Deal !