Il vaut mieux être nulle part au même moment que partout à la fois.

Aborder un ouvrage de S.K ne nécessite, en général, aucun effort cérébral particulier. On le lit et on le suit là où il veut nous emmener. A lui de fournir l’effort pour que la magie s’opère.
On est hélas loin du compte ici.
Malgré un départ très prometteur – un homme confronté à des preuves scientifiques irréfutables est accusé de meurtre alors que d’autres preuves tout aussi imparables prouvent qu’il était ailleurs à ce moment là – mais trop axé polar, domaine où S.K n’excelle pas, l'histoire s'essouffle rapidement. A trop vouloir résoudre une enquête qui dès le départ s’avérait insoluble, S.K est obligé d’en revenir à son registre de prédilection : le surnaturel et le fantastique horrifique.
Mais le cœur n’y est pas. Comme si King ne croyait plus en ses propres histoires ou comme s’il était devenu lui-même l’outsider qu’il dépeindra plus tard comme « fatigué, affaibli, voire épuisé ».
A son lecteur, cette fois, de fournir l’effort pour le suivre. Et pour l’y encourager, il se sert de ses personnages, tout aussi rétifs que nous.
« Des choses surnaturelles ? Mais je ne peux pas croire à ces choses-là ! Et je n’y croirai jamais »
Ou :
« Une partie de moi veut pourtant y croire »
Ou :
« Ces monstres existent, Ralph, ils vivent parmi nous, vous le savez ! »
Ou encore :
« J’ai besoin que vous y croyiez, Ralph. Moi, j’y crois mais ce n’est pas assez* »
Et enfin comme s’il comprenait que son lecteur était encore bien loin de le rejoindre :
« Ecoutez-moi, finis le ‘si’ et le ‘peut-être’. Aujourd’hui l’outsider existe ! Plus de suppositions. Uniquement des convictions, en êtes-vous capables ? »
Finalement, lassé, le lecteur admettra donc que l’outsider existe bel et bien mais la confrontation finale avec lui se résumera à un navrant face à face de 10p (sur 800)
Au final un S.K. bien décevant mais tout juste digeste parce qu’il nous offre une fois encore une bonne tranche d’Amérique profonde toujours aussi curieuse à observer : œufs brouillés et frites panées au petit-déjeuner, épis de maïs au barbecue, pick-up et SUV surélevés, quelques piques contre Trump et ce Texas, plus que jamais l’état américain le plus dépourvu en neurones.
Le seul miracle de S.K. c’est qu’on continue à le lire même lorsqu’il n’est pas très bon.

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le 1 juin 2020

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