Le ka est une roue, dit-on.
La roue, c'est aussi l'unité de mesure de distance que les habitants de l'Entre-deux-Monde et des Baronnies utilisent de préférence au mile.
Roland et son ka-tet, nous les avons suivis sur bien des roues, durant bien des années et avec des fortunes diverses. Voilà qu'ils nous reviennent, le temps d'un bout de chemin, ou plutôt d'une halte, sur le Sentier du Rayon.
Le ka est une roue dont le moyeu est la Tour Sombre. Si la Tour tombe, tous les où, tous les quand s'effondreront et leur déliquescence plus ou moins sensible est la conséquence de cette maladie qui ronge la Tour.
Le récit de La Clef des Vents a lui aussi son Moyeu: l'histoire de Tim Ross.
Comme la Tour, le reste n'est que prétexte pour y parvenir. Le récit-cadre, dans lequel Roland et son ka-tet s'abritent durant un Coup de Givre, est anecdotique et franchement dispensable. L'enquête menée à Debaria est un écrin un peu plus élaboré, mais n'est pas grand chose de plus. Je crains de ne pas être très attaché au jeune Roland, mais même compte tenu de cela, ses interactions avec Jamie et les habitants de Debaria ne m'ont paru ni éclairantes ni vraiment intéressantes. Seul le conte de la Clef des Vents fait sens. Fait vibrer. Interpelle.
Contrairement à la Tour, il tient bon. Point de Roi Ecarlate dans le fruit. Là où la Tour est malade, l'histoire de Tim est fondamentalement saine. Le récit a à la fois la simplicité des contes et leur complexité, leur lumière et leur noirceur. Et il est diablement efficace, alors que le reste de l'ouvrage ne l'est pas.
J'ai fait, dans la Clef des Vents, une expérience de lecture radicalement opposée à celle du reste de la Tour Sombre. Dans le reste du cycle, j'ai adoré cheminer vers la Tour. Les haltes, comme celles de Magie et Cristal m'ont agacé. Je rongeais mon frein pour reprendre la route au plus vite... tout en appréhendant d'arriver à la Tour.
De la Clef des Vents, seul le Moyeu m'a séduit. Le reste m'a souvent indifféré, parfois un peu agacé. J'aimerais, à l'occasion, en savoir plus sur Tim. Voir le jeune garçon devenir un pistolero. Découvrir l'ancienne Nouvelle Canaan par ses yeux. Revoir Maerlynn et lui poser d'autres questions. Le tout en étant libéré du ka-tet de Roland car, même si le ka est une roue, l'histoire de Tim, que Stephen King nous fait miroiter, peut tenir par elle-même.
Mais cette histoire est une histoire pour un autre jour, semble-t-il. Puisse-t-il y avoir de l'eau.