Deuxième étape franchie pour mon parcours "Rougon-Macquart". J'ai lu "La Curée" ; et je dois dire que je n'ai pas été charmé par la démarche de Zola cette fois. Ces quelques 300 pages recèlent d'excellents moments - je pense au traitement cruel Renée, ou aux descriptions sans concessions du système spéculatif de ce Paris en plein essor ; comme d'habitude, l'écrivain a travaillé sa matière jusqu'au bout, et font s'entremêler à la perfection les destins particuliers, les nerfs, les passions de chaque individu et le bouillonnement du peuple. Mais quelques problèmes se posent - à mon sens. D'abord, si effectivement le personnage de Renée est intéressant et touchant, sa relation avec Maxime souffre d'une comparaison que Zola va jusqu'à introduire lui-même : on est très loin de la puissance tragique d'un Phèdre. Ce couple clandestin batifolant dans les chaleurs d'une serre ne fait de loin pas brûler le même feu que les lamentations déchirantes de la matrone antique. À côté, leur histoire est bien pâle. Du coup, quand on arrive aux dernières pages,
on ne peut que déplorer cette fin bâclée, peu recherchée, qui ne fait même pas écho au vécu de la jeune femme - n'importe qui aurait pu succomber à cette méningite ; l'inceste n'entre même pas dans l'équation. Mais peut-être était-ce une volonté de Zola. Peut-être ne voulait-il pas entrer dans le cliché. Et surprendre par la banalité.
À ce manque de verve tragique, j'ajouterais le côté pompeux et niais de certaines scènes - le spectacle des dernières pages a réveillé en moi cette bête qui aimerait sauter quelques pages (la bête en question étant calmée par l'idée que lire toute une saga, c'est la lire en entier). Le projet de Zola suppose ces quelques scènes sans grand intérêt ; ici, évidemment, il s'agit de voir à quelles futilités s'adonnent les riches une fois engraissés par la conquête de la capitale. Il n'empêche que le lecteur ne peut - je crois - que s'ennuyer devant ces fresques mythologiques improvisées.
En somme, les coups d'éclats de la "Curée" se jaugent par moments, comme souvent chez Zola par fragments de style et d'envolée poétique, mais il y a au final peu de choses à se mettre sous la dent.
Les intentions de l'écrivain sont claires, le cahier des charges a été rempli, mais le tout sent légèrement trop la procédure pour me convaincre. Allez, on passe au "Ventre de Paris" !