Cher journal Millénium, si je t'écris aujourd'hui, c'est pour te dire que tu devras poursuivre ton chemin sans moi. Afin que tu comprennes ce choix, une petite rétrospective s'impose.
Tout avait pourtant si bien commencé il y a quelques années, lorsque j'avais décidé de me lancer dans un univers inconnu : le polar. Ne connaissant rien de ce genre, ni ne demandant de conseils, je me suis engagé dans le rayon qui t'étais destiné et je suis tombé sur toi. La première chose qui m'avait marqué chez toi, c'était ta couverture. Une petite tête avec des tresses, type Mercredi de la famille Adams, et un titre " Les hommes qui n'aimaient pas les femmes " qui faisait écho. Ni une, ni deux, tel un joueur de poker acculé, j'ai tout misé sur toi.
Et là, quelle fut ma surprise. Aussi belle qu'inattendue. Des nuits et des nuits à essayer de m'acclimater à ton climat glacial, à tout faire pour prononcer correctement les noms imprononçables des villes où tu voulais m'embarquer (P.S.: je n'y arrive toujours pas), à me familiariser à ton univers sombre et les personnages qui gravitaient autour. Après ce pavé/coup de cœur, je me suis dit qu'on ne pouvait pas en rester là.
Alors je me suis précipité sur ta petite sœur : " La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette. Rien que le nom claque. En parlant de claque, c'était la deuxième. Une nouvelle affaire qui cette fois-ci était plus sérieuse que la première puisqu'elle allait nous plonger dans le passé d'un personnage qui allait devenir un élément moteur de la saga, Lisbeth Salander. L'histoire se finissait pratiquement sur un cliffhanger. De quoi titiller ma curiosité, chose dont tu n'avais pas besoin, et mon portefeuille. On a donc continué notre petit bout de chemin ensemble.
Vient enfin ce qui avec le recul aurait dû être notre dernier rendez-vous : La reine dans le palais des courants d'air. Une fois encore, tu avais réunis tous les ingrédients qui avaient fait que j'étais devenu accro à toi. Toujours cette même passion de te suivre malgré les années qui passaient. Mais cela aurait dû être la fin. Une fin ouverte, logique et suffisante.
Puisque malheureusement, entre temps, ton créateur nous a quitté. Il aurait dû emporter avec lui l'idée de faire une suite à cette histoire, mais c'était sans compter l’appât du gain. Du coup, un opportuniste qui avait comme seul fait d'arme la biographie d'un footballeur suédois a repris le flambeau et un quatrième tome a vu le jour : Ce qui ne me tue pas. Le titre aurait dû me mettre la puce à l'oreille. C'était sans compter ma curiosité qui avait encore pris le dessus, alors j'ai jeté un coup d’œil pour voir ce que tu étais devenu. Mal m'en a pris, je ne t'ai pas reconnu. Enfin si, tu avais toujours le même nom. La capacité à me raconter une histoire et la profondeur des personnages en moins. Tu n'étais clairement plus aussi inspiré qu'avant.
Ma déception passant et espérant que l'épisode précédent n'était qu'une erreur de parcours, comme je suis quelqu'un qui ne se lasse pas facilement des choses qu'il a aimé, je me suis lancé sans trop me précipiter cette fois-ci dans le cinquième tome : La fille qui rendait coup pour coup (j'ai découvert par la suite qu'il y en avait un sixième). Même constat en pire. Un épisode sans saveur où même la mort d'un personnage important des premiers tomes n'a eu aucun impact sur moi. Les personnages, à commencer par Lisbeth ou Mikael, n'ont plus la même profondeur qu'avant. L'intrigue sur fonds d'expériences génétiques est vue et revue et ne laisse donc place à aucun suspense. L'épaisseur de tes deux derniers tomes montre à quel point tu n'as plus rien à me raconter.
Pour finir, si je devais renommer les trois premiers tomes, je les appellerais I Séduction. II Passion. III Séparation. En résumé, le cheminement classique d'une histoire d'amour qui se termine mal.
Cher journal, salut.