Je reste encore dans la torpeur que m'a provoqué le bouquin de Damasio que je viens de finir. Mon esprit, à coups de blaast, s'est disséminé dans la recherche des raisons de cette beauté, de cette violence, de ce rythme, de cette vanité. De ce mouvement continu vers une explication, vers la connaissance et la découverte.


J'ai pris un infini plaisir et une vraie curiosité à accompagner cette 34ème Horde du Contrevent, certainement l'ultime, dans leur quête de l'Extrême Amont. L'origine du vent qui souffle sans arrêt, agresse, mord l'humanité depuis son existence. Mais sans qui elle ne vivrait pas. Ce vent que certains humains apprivoisent, à l'image des Fréoles, mais dont d'autres veulent en trouver la provenance dans l'espoir de maîtriser et comprendre la source même de leur existence.


//Spoilers


Dans ce monde fantastique, le vent n'est naturellement pas ce que nous connaissons, il est une entité, il créé et anime, détruit et évapore. Parents du vif, des chrones et sous ses neufs formes, il demande à la Horde l'absolu dévouement de leur existence pour cette quête.
Des décennies durant, avançant face au vent, ensemble et soudés, droit devant, c'est leur vie d'enfant, de futur parent, qu'ils ont sacrifié. Mais quelle vie?
Car c'est une autre vie qui prend forme chez eux, celle d'une quête de connaissances, d'explications et d'expériences. C'est La Trace, la direction vers la source du vent. Tous ensemble et un par un.
Dans l'adversité et l'affrontement, chacun devient le meilleur de lui-même. Le vent nourrit leur vif, les développe en tant qu'humain. Ils avancent et se trompent, comprennent et apprennent.
Dans les pires moments, ils sont toujours tous ensemble. Les morts restent en vie dans les souvenirs. Dans l'espoir de les revoir en Extrême Amont.
Puis vient le moment tant attendu après tous ces sacrifices, la connaissance ultime, le bout de la quête, la fin du chemin. Et puis quoi?
Rien. L'Extrême Amont n'est rien. Il n'est que l'Extrême Aval.
Comme ce vif qui traverse chacun d'eux, la Terre qu'ils foulent n'est qu'une boucle sans fin et sans limites.
Où le sens de leur vie n'a été que dans le mouvement absolu de leurs espoirs, de leurs quêtes et de leurs sentiments et non pas dans la trajectoire relative d'un point à un autre.
Où le livre n'a été qu'un enchaînement en rythme de mots, de signes, de rebondissements et de figures de style admirablement bien manié et non pas simplement un début et une fin.
On ressent alors comme nos hordiers, on se mêlent à eux dans cette volonté de comprendre, d'avancer encore et encore, quand tout paraît si évident et si insaisissable à la fois. On ressent la frustration de n'avoir pas tout saisi, de ne pas avoir tout sauvé, la rage fatiguée d'avoir parcouru tout ce chemin, d'arriver au bout et de n'avoir aucune de nos attentes.
On choisit alors de continuer d'être le chameau obstiné qui ira tout au bout de la quête qu'on lui a confié, de rester le lion fatigué et blessé mortellement de devoir encore comprendre ce qu'il veut savoir ou bien on renaît en enfant innocent pour recommencer la boucle, tout oublier, tout accepter et créer en ne sachant qu'une chose:
Que la vie est absurde, qu'elle n'est qu'un va et vient entre nos espoirs et peurs, entre nos actions et inactions, entre notre mouvement et notre immobilité.
Que l'on arrivera jamais à tout comprendre, à aller où l'on veut, devenir qui l'on veut et pourtant qu'on le fasse, dans l'espoir de.
Qu'on ne peut savoir où et quand elle commence et finit, que l'on peut juste savoir où elle passe.
Que la vie ce n'est que du vent mais qu'il faut avancer. Qu'on est pas des "putains d'abrités".

klintou
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le 9 oct. 2016

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