Ce livre a une double singularité. Il s’agit d’un planète-opera de fantasy écrit par un Français. En une phrase, on pose déjà les bases d’un livre atypique. Hors ce n’est pas dans la catégorie ni par son auteur que cet œuvre se démarque le plus mais par sa construction. En effet, la première remarque que l’on fait en commençant le livre, c’est de débuter à la 700eme page. La seconde remarque est dans le corps du récit. Il est constitué de blocs de texte qui commencent tous par un petit signe cabalistique. Ce signe fait référence à la personne qui décrit la scène car contrairement à tous les autres livres que vous avez surement lus, le narrateur change.
Le récit prend place sur une planète balayée par des vents en continu. A Aberlaas, ville située la plus en Aval de la planète, les sages, au fil des années, ont formé des hordes capable de contrer le vent pour remonter la planète jusqu’en Extrême-Amont. Ces hordes ont pour mission de trouver l’origine ainsi que les 9 formes du vent. Pour cela, ils doivent l'affronter à pied.
Nous rentrons dans le récit en suivant la 34eme horde partie d’Aberlaas depuis 30 ans (ils partent vers 12 ans). Je vous préviens de suite, ce livre est un livre élitiste, il faut une certaine abnégation pour l’aborder. Pour vous donner un exemple, il faut patienter 130 pages pour que les 23 personnages de la horde soit présentés et pendant ce temps, vous ne savez ni qui ils sont, ni où ils sont, ni pourquoi, vous tombez en pleine scène d’action, en lutte contre un furvent. Si vous ne savez pas ce qu’est un furvent vous l’apprendrez mais pas avant les 2 ou 300 pages et ceci va de même pour crivetz, schnee…C’est assez déroutant. L’auteur a créé tout un vocabulaire autour du vent ainsi qu’une codification pour le décrire !
Après 200 pages environ, vous pourrez vous faire aux changements de personnages et vous n’aurez plus à vous référer au marque-pages pour identifier le signe et savoir qui parle. En plus certains personnages ne parlent que très rarement, les plus récurrents sont les personnages les plus lettrés de la horde (le scribe, le troubadour, l’aéromètre, le prince) plus le traceur. Tous ont un vocabulaire et une grammaire propre (les envolées lyrique et poétique du Golgoth me manquent déjà…). Je vous le répète, ce livre n’est pas à la portée de tout le monde et certains pourraient être rebutés d’attendre 200 pages pour que le récit commence ou pour se faire au système de narration. En ce qui me concerne j’ai adoré ces changements de point de vus surtout lors des combats et des scènes d’actions qui permettent l’accès aux ressentis des personnages !
Autre difficulté, c’est le rythme du récit ; nous prenons le récit au moment où les personnages ont la trentaine pour finir vers 50 ans soit 20 ans en 700 pages. Il y a des moments d’ennui des personnages à contrer dans des contrées monotones que le lecteur ressent à la lecture. Pour beaucoup, cela pourrait paraitre une narration laborieuse, en revanche, pour d’autre, (dont je fais partie), nous avons l’impression d’empathie envers les personnages du récit. Chose étonnante, les personnages se posent un temps au Camp Boban et j’ai fait de même, j’ai stoppé ma lecture involontairement à cause des vacances de Noël. Le mimétisme est assez drôle je trouve.
Si vous parvenez à passer toutes ces difficultés, vous allez découvrir un monde plein. Des personnages hauts en couleur (Caracole !!!!!!), mémorables, quasiment vivants avec leurs forces et leurs faiblesses (certains personnages ne se révèlent qu’à la fin). L’auteur a une imagination débordante concevant la vie en perpétuelle mutation, mouvante créée à partir de vents. Je ne vais pas trop en dire pour ne pas vous gâcher le plaisir. Je concède que la fin peut paraître quelque peu décevante mais pour moi, elle est tellement belle et logique!
Pour conclure, je pense que ce livre mérite la meilleure note mais attention il pourrait n’avoir que 3/5 voir moins dans des mains de lecteurs occasionnels