C'est une critique qui promet d'être à la fois subjective et authentique. Parce qu'avant la Horde, je ne lisais pas. Jamais. L'école et les cours de français ne m'avaient pas vraiment donné envie de me plonger dans les livres. Je leur préférais, comme beaucoup des jeunes de ma génération, la musique, les films et les séries. Parce que je les voyais comme des oeuvres de consommation immédiate, plus faciles, plus rapidement assimilés, qui demandaient moins d'efforts.
Et puis un beau jour on m'a offert la Horde. Deux semaines plus tard, j'ai changé d'avis sur beaucoup de chose. Et je ne pourrai jamais assez remercier Alain Damasio pour ce truc que la Horde a déclenché en moi. Ce bouquin, il a fait naître du vif en moi ! Une furieuse envie de bouquiner, de découvrir des personnages, des mondes, des histoires, de les accompagner de page en page puis de les laisser là, jamais trop loin.
La Horde, c'est d'abord une de ses histoires dont on ne se remet jamais vraiment. L'univers est vaste, immense et tout à fait crédible pour une seule raison : on sent qu'il a du vécu, qu'avant le début de ce récit, il y en a eu des centaines d'autres sur ce même territoire. Et c'est bien là le truc le plus important dans une oeuvre de fiction.
La Horde, c'est aussi un style fou. Fou parce que cru par moment mais ultra distingué par d'autres. Fou parce que chaque personnage sans exception possède sa propre façon de penser et qu'elle est retranscrite par une syntaxe et un vocabulaire différent. C'est incroyable. On passe de la détermination vulgaire de Golgoth à l'inquiétude vacillante de Callirhoé, la petite flamme. Et on avance avec eux, et on se lie à leur voyage.
Quoi foutent derrière ? J'avance à l'allure d'un tas de pus, le vrai
traine-plaie et personne n'a été foutu de me prendre le sillage !
Et le jour où il n'y aura plus de couleur nulle part, où tout sera
blanc sur la terre comme au ciel, je me trancherai une veine pour que
tu puisses encore voir du rouge !
Et c'est bien ça la force de la Horde, c'est que dès les premières pages, on veut aller au bout. On veut remonter ces pages comme ils remontent le vent, on veut savoir d'où il vient, ce satané vent.
La 34 ! Au bout !
Et puis c'est avec la Horde que le talent d'Alain Damasio s'exprime à pleins poumons. Trois ans seul dans le maquis corse pour écrire la Horde. Et bon dieu, ça se ressent. Chaque phrase semble avoir été travaillée des heures et des heures. Non pas que l'auteur cherche à tout prix la complexité hautaine comme le font certains, mais il travaille comme un orfèvre. Chaque mot a sa place. Chaque mot à sa place.
D'un point de vue purement littéraire, la Horde c'est un pèlerinage. Une sorte de long voyage vers un style tellement déroutant, mais tellement authentique.
Et puis pour finir, la Horde c'est un personnage incroyable, qui sort de tous les carcans et les fiches personnages préconçues. La Horde, c'est Caracole.
Bref, je suis brouillon et incomplet, mais je ne peux que conseiller la Horde.
La folie n'est plus folle, dès qu'elle est collective.